Un homme roule sur une route de campagne. Il rentre chez lui. Il est presque rendu. C'eût été trop simple: une voiture arrive en face, c'est celle de son ami Lucien mais, quand il la croise, Lucien n'est pas à l'intérieur, c'est une femme qui conduit, une inconnue au visage flou, dominé par le rouge. Qui est-elle? Et Lucien, où est-il? Et ce rouge, qu'est-ce que c'est? Du rouge à lèvres? De la confiture? Du sang? On dirait des peintures de guerre.
Des larmes et du sang, voilà bien ce que promet le beau titre du nouveau roman de Christian Gailly. Nuage rouge, c'est l'annonce de ciels peints, chargés d'un orage que la prose ne cessera de remettre, éludante et dilatoire, sournoisement enjouée. C'est aussi l'invention, peut-être, d'une forme originale de fiction: le polar bègue. Bègue, le narrateur l'était avant que ne commence son histoire, que ne se délie sa langue de témoin - héros, il ne le sera de rien, pas même du fait divers assez sordide qui sert d'intrigue à ce livre saisissant.
Fabrice Gabriel, Les Inrockuptibles
Les personnages de Christian Gailly sont, plus que jamais, de son propre aveu, des égarés. À l'image de Rebecca Lodge, l'héroïne danoise de Nuage rouge, qui, 'sans perdre de vue le soleil et l'amour', finit par s'égarer, un après-midi d'été, sur une petite route de la campagne vendéenne. Multiples variations sur un même geste, oscillations infinies, art, merveilleusement affiné, de la suspension. Christian Gailly emporte définitivement le c?ur.
Jean-Noël Pancrazi, Le Monde
Présentation de l'éditeur
«C'est le plus lointain, celui que j'aime à explorer, qui me donne le plus de frissons. Écoutez-moi raconter mon pays, l'Égypte, la mère du monde. Remplissez bien votre clepsydre, le voyage compte quatre mille et une années et il n'y a pas de halte.
Jadis, en ces temps fort lointains, avant la Malédiction, j'ai vécu en Égypte au pays de Pharaon. J'y suis né et c'est là que je suis mort, bien avancé en âge...»
Présentation de l'éditeur
«J'écris à l'écran, je n'ai plus besoin de toucher pour sentir, j'effleure seulement. Mon écrit est de la graine de traces. Il est eau. L'écriture aujourd'hui, moderne poétique de la peau, n'écorche plus le papier. Fi des parois scarifiées. Elle se tient loin du manuscrit, du parchemin, de cette peau de veau mort-né, encore sanguinolente, dont le vélin tira sa palpitante origine. Elle n'est plus une écriture mordeuse de chair, qui tatoue le texte sur la peau des livres - et c'est pourquoi d'ailleurs elle se mémorise si mal.
Elle dit qu'il n'est plus nécessaire de faire saigner la peau pour que l'écriture suinte vive, elle procède virtuellement, elle s'inscrit à l'écran liquide.
L'écriture est bain.»
Présentation de l'éditeur
«Je n'invente rien, c'est dans le dictionnaire étymologique : le mot est d'abord employé pour désigner un acte qui dépasse la mesure, un dérèglement. Je vous passe les détails mais, à la fin, l'emploi du mot au sens de «très grand», et de son adverbe au sens de «très» ou «tout à fait» et cela sans idée d'excès, est fréquent. L'excès non seulement résiste aux règles imposées par les pauvres types sus-nommés, mais permet aussi de nous multiplier, de nous essayer à toutes les sauces, tous les possibles, de grandir en somme. Tant pis si on est excessivement mauvais. Il n'y a à perdre que des illusions, des résidences secondaires, des voitures, des slips de bain.»
Présentation de l'éditeur
«Nous vivons désormais dans le 'présent perpétuel' prédit par Debord. Oh, sinistre prestige de la table rase, conjugué à la tyrannie du spectacle... De plus en plus souvent, les romans qui agitent l'opinion donnent à pressentir une littérature sans mémoire, une communauté réduite aux caquets de l'autobiographie, maigrelette et touche-pipi, jetant des anathèmes pathétiques sur l'imagination qui lui fait défaut, arpentant les champs de bataille cathodiques, parée de fausses-vraies balafres et de peintures de guerre tendance, fixant sur la caméra un regard terrible : 'J'ai l'air assez barbare, là ?' Et il arrive, oui, que l'on trouve cela délicieusement barbare.»
Présentation de l'éditeur
Un électricien victime de fous rires intempestifs perd son travaiL Une femme renonce à son fantasme d'amant viril et charbonneux de peur de salir son tailleur beige. Un écrivain brise en mille morceaux, à la fin de chaque livre, le siège sur lequel il l'a écrit... Entre Desproges et Beckett, des instantanés insolites, féroces et extrêmement drôles des petits dérapages de la vie quotidienne.
« C'est bien là le signe distinctif de cet écrivain, un style qui capte l'attention, l'intercepte, la fixe. Le charme, quoi. » Le Monde
Présentation de l'éditeur
Une nuit, Anan est frappé par une révélation : l'homme ne descend pas du singe mais du néant. Pour le jeune homme, les conséquences de ce postulat s'enchaînent alors de façon lumineuse : le temps est une illusion, toute valeur n'est qu'endoctrinement et les êtres humains n'existent pas plus que les personnages du roman qu'il est en train d'écrire. Et tant pis si parents, amis ou psychiatres restent hermétiques à de telles considérations philosophiques... Dans ce roman déroutant et inclassable, Svetislav Basara se moque férocement des conventions et pousse la logique de l'idéologie jusqu'à l'absurde en bousculant joyeusement nos certitudes.
Présentation de l'éditeur
Au début du XXe siècle, dans le Nord de la Suède, une famille de paysans-ouvriers employés dans les scieries vit dans une misère noire aggravée par le froid, la neige, la forêt... et l'obscurantisme d'une religion qui considère comme un péché tout ce qui relève de l'art ou du plaisir.
Les malheureux tentent de constituer une association ouvrière, et même de faire grève. Ils vont de déceptions en échecs. Certains seront poussés au suicide, envisageront l'exil vers l'Amérique, tandis que d'autres se tourneront peu à peu vers une forme de foi paraissant plus clémente que le protestantisme: le socialisme.
Vies, morts, espoirs collectifs ou personnels, Per Olov Enquist raconte avec une profonde empathie l'histoire du pays de son enfance, dont certains membres de sa famille sont les acteurs. Et l'on retrouve dans ce qui est l'un des premiers romans de l'auteur des thèmes qu'il développera tout au long de son oeuvre: l'homme magnétiseur des foules, la peur de la douleur, la trahison par honnêteté...
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Paisible fonctionnaire et terne époux, M. Wakefield décide un jour de s'absenter : il jette quelques affaires dans une valise, prétexte la nécessité d'un court voyage et disparaît. Les jours passent, M. Wakefield ne revient pas et Mme Wakefield découvre bientôt qu'il s'est installé... de l'autre côté de la rue ! Pensant qu'il ne tardera pas à revenir à la raison, elle attend. Et les années s'écoulent...
Cette brillante réécriture du conte de Nathaniel Hawthorne, Wakefield, se place du côté de l'épouse avec un ton cocasse et cruel, brocardant le conformisme puritain de Mme Wakefield tout en s'amusant de son exemplaire fidélité à l'incompréhensible mari.
Un volume manque dans la bibliothèque du fugueur, se peut-il que ce livre constitue le début d'une explication ?
Présentation de l'éditeur
Toutes ces histoires sont rigoureusement authentiques. Certaines paraîtront donc incroyables. La plupart sont datées et localisées. Cela répond à un besoin que l'on a eu de rappeler une évidence : ce qui est pris sur le vif s'évanouit dans le néant, mais, en même temps, les images les plus fugaces sont souvent celles qui s'accrochent le mieux à notre mémoire. Nous sommes faits de cette mosaïque dérisoire autant que de nos projets grandioses.
Quant au ridicule, il guette chacun d'entre nous et nous invite donc à la compassion vis-à-vis d'autrui. Et quant à la sagesse, pour ceux qui en rêvent encore, elle commence par savoir rire de soi. Quant à ce recueil, on voudrait qu'il tombe, page par page, comme un joyeux goutte-à-goutte. Y a-t-il des volontaires pour la perfusion ?
Un étonnant florilège de vignettes comme autant de brèves de comptoir recueillies par l'auteur du Voyage de Monsieur Raminet.
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