L'invention de Philippe Muray

L'invention de Philippe Muray
de Vitry Alexandre
Ed. Carnets Nord

Mars 2010, Fabrice Luchini lit Philippe Muray. Ou comment passer du statut d'artiste confidentiel à celui d'écrivain en vogue qu'on cite dans les dîners parisiens. Mais le Philippe Muray qu'on décrit comme un pamphlétaire ne donne qu'une image grossièrement simplifiée de cet écrivain : au-delà des « billets d'humeur » les plus connus, il a en effet légué une oeuvre complexe, marquée par sa vision grinçante - mais libératrice - de l'individu et de la société.

En s'appuyant sur le grand-oeuvre de Philippe Muray, Le XIXe siècle à travers les âges, cette véritable petite encyclopédie plonge le lecteur dans les coulisses de son écriture, pour découvrir comment il invente une nouvelle manière de dépeindre l'homme moderne - et comment l'écrivain Muray s'invente à travers la lecture de ses prédécesseurs.

Entre rire et désillusion, comique et tragique, c'est un personnage riche d'infinies contradictions dont on découvre ici le portrait.

La cause des livres

La cause des livres
Ozouf Mona
Ed. Gallimard

J'ai réuni dans ce livre des articles que, pendant quarante ans, j'ai donnés au Nouvel Observateur. Une actualité littéraire fantasque les a souvent inspirés, les figures imposées du journal en ont toujours dicté la forme : c'est une brocante où le hasard semble avoir plus à dire que la nécessité.

Et pourtant, cette promenade buissonnière à travers les livres dessine peu à peu un itinéraire familier. On retrouvera ici les aveux du roman, les mots des femmes, l'ombre portée de la Révolution sur les passions françaises, et un tableau de la France et des Français où l'on voit une diversité obstinée tenir tête à la souveraine unité de la nation.

Ces rencontres d'occasion avec les oeuvres et les figures du passé me renvoient donc à mes goûts et à mes attaches. Je n'ai pas de peine à reconnaître en elles des voix amicales et des présences consolantes. Mais j'y vois aussi surgir l'événement intempestif, la rencontre inattendue, la surprise des sentiments. La littérature et l'histoire, sur la chaîne usée des destinées humaines, n'ont jamais fini de broder les motifs inépuisables de la complexité. Telle est la cause des livres.

Leçons sur la langue française

Leçons sur la langue française
Guyotat Pierre
Ed. Léo Scheer

De 2001 à 2004, Pierre Guyotat a donné à l'université Paris-VIII Saint-Denis, dans le cadre de l'Institut d'Études Européennes, devant un auditoire composé de jeunes étudiants en grande partie étrangers, un cours d'« Histoire de la langue française par les textes », qui est ici retranscrit dans sa quasi-intégralité.

Lectures commentées, éléments d'une pensée de la langue et de l'Histoire, récits de la vie intérieure, sociale, politique, des grands auteurs et de la scolarité de Pierre Guyotat, dans la continuité de ses derniers livres, Formation et Arrière-fond, permettent de renouveler l'idée que l'on se faisait des grands textes classiques et, en offrant une vue unique de la relation que l'auteur d'Éden, Éden, Éden entretient avec eux, de remonter aux sources d'une oeuvre, la sienne, qui ne cesse de s'inventer.

L'ensemble forme une anthologie à la fois intime et universelle : parcours de savoir et d'imagination dans l'Histoire de la France et de l'Europe, et au-delà - le Nouveau Monde, l'Empire ottoman, la Chine... Du Serment de Strasbourg à Paul Claudel, de Rutebeuf à Buffon, de Montaigne à Tocqueville, de la science à la peinture, à la musique, à l'architecture et aux lois, d'Ézéchiel à l'Henry V de Shakespeare, c'est toute une tradition occidentale qui est ici exposée librement et liée à l'actualité immédiate, par un des créateurs les plus puissants du dernier demi-siècle.

Dictionnaire André Malraux

Dictionnaire André Malraux
Collectif
Ed. CNRS

Le dictionnaire total qui épouse le rythme d'une vie menée tambour battant, de l'Indochine à l'Espagne, de Trotsky à De Gaulle, de la Résistance au ministère de la Culture, de La Condition humaine aux Chênes qu'on abat. Malraux restitué dans toute sa diversité, dans tous ses paradoxes et dans tout son génie. Malraux public et privé, esthète et aventurier, solitaire et mondain, séducteur et timide. Malraux et son rapport à l'enfance, à l'argent, au bonheur, à la mort, à la religion, à la science, aux femmes et à lui-même.

Près de 300 notices établies par des universitaires (français, chinois, japonais, américains, turcs) mais également des témoins (Sophie de Vilmorin, dernière compagne de l'écrivain, Alain Malraux, neveu d'André, Dominique Desanti), des philosophes (Bernard-Henri Lévy), des écrivains (Jorge Semprún), des conservateurs de musées.

Une entreprise éditoriale sans précédent.

Un monument de savoir, à la mesure de la place occupée par Malraux dans notre roman national.

Conscience et roman, vol. 2. La conscience à mi-voix

Conscience et roman, vol. 2. La conscience à mi-voix
Chrétien Jean-Louis
Ed. Minuit

Renouvelant profondément la présentation de la conscience, Gustave Flaubert et Henry James ont ouvert au roman des régions jusqu'alors inconnues, et donné à ce genre au XXe siècle la mesure de sa tâche et de son exigence. Le jugement moral sur les personnages s'atténue ou se suspend, au bénéfice d'une description aussi fine qu'ambiguë. Et cette descente dans les abîmes intérieurs délaisse désormais la trop nette articulation du monologue intérieur (étudié dans La Conscience au grand jour) pour une approche plus subtile, notamment grâce au style indirect libre, dans une parole à mi-voix.

Comment les mouvements et les glissements de la conscience en viennent-ils à prendre une force dramatique plus intense que les événements même du monde ? Pourquoi son « intime aventure » occupe-t-elle à présent le centre ? En quoi ce qui faillit seulement avoir lieu peut-il avoir autant d'effet que ce qui se produisit ? Par quels modes du style le secret peut-il être suggéré comme tel, avec tout le non-dit qu'il suscite ? Pourquoi la vie quotidienne se fait-elle ce qu'il y a de plus lourd d'un sens inépuisable ? Et quel jour neuf se lève-t-il alors sur notre relation aux choses et aux lieux, comme sur les rapports de force qui ordonnent nos multiples liens avec les autres consciences, noeuds de notre identité ? Comment montrer avec rigueur le règne en nous du faux, de l'illusion, du clair-obscur ?

Ce volume présente les conclusions du diptyque sur la vision que le roman des deux derniers siècles a prise de l'humaine conscience dans toutes les nuances de sa fragilité.

Sous le signe de Baudelaire

Sous le signe de Baudelaire
Bonnefoy Yves
Ed. Gallimard

Tout à la fois un hommage à Baudelaire, un dialogue avec lui et une lecture de son oeuvre, ce rassemblement chronologique de quinze essais d'Yves Bonnefoy sur Baudelaire s'échelonne sur plus de cinquante années, au cours desquelles Baudelaire n'a cessé de l'accompagner.

À Baudelaire il doit, écrit-il, « d'avoir pu garder foi en la poésie ». Car « aucun, sauf Rimbaud », ne montre aussi fortement que l'espérance « peut survivre aux pires embûches de la conscience de soi. Aucun pour descendre avec tant de modestie exigeante des hauteurs intimidantes de l'intuition poétique, où pourtant il ne cesse de revenir, vers la condition ordinaire », « aucun », enfin, « pour encourager plus efficacement ceux qui croient en la poésie à ne pas décider trop tôt qu'ils sont indignes de son attente ».

Ainsi, « les grands poètes sont ceux qui nous aident » « à nous diriger vers nous-mêmes ». Et « c'est même cette recherche de soi qu'ils attendent de nous, avec l'offre que nous partagions leurs soucis, leurs espoirs, leurs illusions, et le désir de nous guider, tant soit peu, vers là où nous découvrirons qu'il nous faut aller. Le voeu de la poésie, c'est de rénover l'être au monde, ce qui demande d'entrée de jeu l'alliance du poète et de ceux qui les lisent sérieusement ».

Poésie de la pensée

Poésie de la pensée
Steiner George
Ed. Gallimard

Les praticiens l'ont toujours su. Dans toute philosophie, concédait Sartre, il y a « une prose littéraire cachée ». Ce qu'on a moins élucidé, c'est la pression formatrice incessante des formes du discours, du style, sur les programmes philosophiques et métaphysiques. À quels égards une proposition philosophique, même dans la nudité de la logique de Frege, est-elle une rhétorique ? Peut-on dissocier un système cognitif ou épistémologique de ses conventions stylistiques, des genres d'expression qui prévalent ou sont contestés à l'époque ou dans le milieu qui sont les siens ? Dans quelle mesure les métaphysiques de Descartes, Spinoza ou Leibniz sont-elles conditionnées par les éléments constituants et l'autorité sous-jacente d'une latinité partiellement artificielle au sein de l'Europe moderne ? Quand tels Nietzsche et Heidegger, le philosophe entreprend d'assembler une langue nouvelle, son idiolecte propre à son dessein est lui-même saturé par le contexte oratoire, familier ou esthétique.

L'association étroite de la musique et de la poésie est un lieu commun, toutes deux partageant les catégories du rythme, du phrasé, de la cadence, de la sonorité, de l'intonation et de la mesure. « La musique de la poésie » est exactement cela. Y aurait-il, en un sens apparenté, « une poésie, une musique de la pensée » plus profonde que celle qui s'attaque aux usages extérieurs de la langue, au style ?

Ces aspects de la « stylisation » de certains textes philosophiques, de l'engendrement de ces textes via des outils et des modes littéraires, George Steiner nous les restitue dans son souci d'« écouter plus attentivement ».

Dans les roues de Jack Kérouac. Portrait d'une Amérique nomade

Dans les roues de Jack Kérouac. Portrait d'une Amérique nomade
Christophe Cousin & Matthieu Paley
Ed. La Martinière

Christophe Cousin - écrivain-voyageur-réalisateur - et Matthieu Paley - photographe - sont repartis sur les traces et dans les roues de Jack Kerouac, pour une traversée d'Est en Ouest, de New York à San Francisco, avec Sur la route entre les mains et l'Amérique sous le plancher de leur voiture.

Afin de rendre hommage comme il se devait aux héros assoiffés de liberté de la beat generation, ils se sont laissé guider par le bitume et leurs désirs de rencontres en laissant résonner les mots de Jack Kerouac sur les paysages du présent. L'appareil photo par la fenêtre, la plume réservée à l'urgence de l'instant, et surtout leur rêve en bandoulière d'atteindre la Côte ouest à toute blinde, ils ont accompagné les vagabonds du rail, les moissonneurs des Grandes Plaines, les cow-boys itinérants du Nevada, les bergers navajos, les utopistes et autres furieux de la vie. Au compteur, plus de 8 000 kilomètres d'aventures au coeur de l'Amérique nomade d'aujourd'hui.

Jarry en ymages

Jarry en ymages
Collège de Pataphysique
Ed. Le Promeneur

Alfred Jarry a partie liée avec les images, et même avec les ymages puisqu'il fonda la revue L'Ymagier avec Remy de Gourmont. Les trois cents illustrations ici commentées montrent ses oeuvres personnelles : peintures, bois gravés, lithographies, dessins, compositions typographiques, manuscrits, correspondance, ainsi que de nombreux documents relatifs à ses livres, à son personnage, à sa vie, au monde littéraire et artistique qui fut le sien et que lui-même fit basculer du symbolisme fin-de-siècle à l'« esprit nouveau ».

Ces documents sont présentés selon un plan polyédrique, par thèmes : trente-neuf petits essais visuels sur Ubu et le Décervelage, sur l'Alcohol et la Phynance, sur les Marionnettes et les Têtes de Turc, ect. L'article Pataphysique est absent parce que, bien entendu, la pataphysique est partout.

Certains de ces documents sont inédits : ainsi la Mère Ubu, marionnette créée par Bonnard pour le théâtre des Pantins, ou ce fragment manuscrit qui remonte aux origines d'Ubu et montre comment opéraient les potaches du lycée de Rennes ; ou inconnus, comme ce dessin de Charly qui enchanta Jarry, « Vous faites là un joli trio tous les deux ! ».

Autant que possible, les oeuvres de Jarry ont été reproduites en couleurs en dans leur mise en page réelle lorsqu'elles apparaissent dans ses livres. De même les oeuvres des peintres qui peuplent ses écrits : Gauguin, Rousseau, Filiger, Bonnard, Toulouse-Lautrec, ou les images d'Épinal, ou les multiples documents. L'ouvrage a été réalisé à partir des archives du Collège de Pataphysique et de recherches ou de prises de vues effectuées spécialement.

Le Collège de Pataphysique, « société de recherches savantes et inutiles » fondée en 1948, a réuni et réunit des esprits aussi singuliers que Raymond Queneau, Marcel Duchamp, Boris Vian, Ionesco, Arrabal ou Jean-Christophe Averty, mais aussi des érudits hors norme qui, entre autres, ont fondé les études jarryques.

Le présent ouvrage a été réalisé sous la conduite de Thieri Foulc, actuel Provéditeur-Éditeur Général du Collège, avec la contribution de Paul Gayot qui exerça les mêmes responsabilités durant plusieurs décennies, de Patrick Besnier, Régent, auteur d'une biographie d'Alfred Jarry (Fayard), et de Julien Schuh, rédacteur en chef de L'Étoile-Absinthe, revue de la Société des amis d'Alfred Jarry.

Casanova, l'homme qui aimait vraiment les femmes

Casanova, l'homme qui aimait vraiment les femmes
Flem Lydia
Ed. Points

Entre Casanova et nous, il y a deux siècles de malentendu. On le croyait un Don Juan de salon, il est l'ami des femmes et l'un des plus grands écrivains du XVIIIe siècle.

Le Vénitien se jette dans l'existence sans rien vouloir en retour, sinon la plus scandaleuse des récompenses : le plaisir. Pour les femmes, Casanova est un homme disponible. Généreux, il ne connaît la volupté que lorsqu'ele est partagée.

À la fin de son exercice, exilé dans un château de Bohême, cet amoureux de la langue française écrit treize heures par jour l'Histoire de ma vie. Pour Casanova, le vrai bonheur est dans la mémoire du temps retrouvé.

Lydia Flem célèbre l'insolent héritage de Giacomo Casanova : au-delà du plaisir, il y a encore du bonheur.

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