« Qu'est-ce qui vous amène? », c'est la question que pose, explicitement ou non, le psychanalyste à celui ou celle qui vient le consulter. Ils pressentent l'un comme l'autre que la vraie réponse sera longue à venir.
Déjà, enfant, Martine Bacherich aimait se raconter des histoires. Devenue une psychanalyste d'enfants et d'adultes, ce goût d'entendre et de fabriquer des histoires ne l'a pas quittée. On pourrait dire d'une analyse qu'elle est une « invention du vrai ».
Martine Bacherich s'inscrit à contre-courant de la plupart des analystes d'aujourd'hui qui se vouent à la théorie et se bornent à évoquer quelques « vignettes cliniques ». Elle s'inscrit en revanche dans la continuité d'un Freud tout étonné et un peu inquiet que ces histoires de cas se lisent comme des romans et manquent du « cachet sérieux de la science ».
Autre singularité de ce livre: son style, un style d'une grande qualité littéraire, précis, subtil, d'où tout jargon est proscrit.
Deux sections. La première, de loin la plus importante, relate une série d 'histoires cliniques - cures d'enfants et d'adultes. Elle se conclut par un hommage savoureux à Françoise Dolto. La seconde section, brève, dévoile d'autres intérêts de l'auteur, pour la peinture notamment et, plus insolite, pour la lingerie féminine.
Présentation de l'éditeur
La psychothérapie analytique des états psychotiques est l'épreuve la plus risquée, mais aussi la plus intime et la plus riche d'une rencontre avec la folie.
Engagé depuis de nombreuses années dans un travail analytique auprès des patients psychotiques, Jean-Claude Polack examine ici concrètement les enjeux théoriques et pratiques d'une telle approche. Il prend à-bras-le-corps l'équivoque de cette rencontre, dont les termes eux-mêmes restent incertains: flou des frontières entre névroses et psychoses, inadéquation de la cure type pour les cas de grande folie, polymorphisme des modes d'expression non réductibles à la seule parole, intrication des délires singuliers et des folies de l'Histoire.
L'auteur dresse ainsi le bilan de l'approche analytique de la folie en mettant en évidence ses points de butée et d'innovation, ses acquis et les chantiers ouverts à de nouvelles investigations. Chacune de ses propositions est illustrée par des monographies cliniques qui montrent aussi en quoi les choix (théoriques, éthiques, esthétiques et politiques) du thérapeute infléchissent constamment le processus de soins.
Présentation de l'éditeur
Issu d'une série de conférences que Dewey donna en 1931 à Harvard, L'art comme expérience propose une vision de l'art adaptée aux sociétés démocratiques et débarrassée des mythes qui en obscurcissent la signification et les potentialités. Ce livre, qui s'attaque aux présupposés majeurs auxquels nos conceptions restent encore largement subordonnées, est à la source de préoccupations et d'orientations dont l'art américain s'est amplement nourri depuis plus d'un demi-siècle. L'intérêt tardif qu'il a commencé à susciter dans le contexte français exigeait qu'une traduction en fût enfin proposée. Il répond à une double attente, celle des philosophes qui s'intéressent à l'art vivant et celles des artistes ou des critiques qui s'attachent à ressaisir leur pratique à la lumière des actions et des formes d'expérience qui en sont réellement constitutives. Jean-Pierre Cometti
Présentation de l'éditeur
Avec Abdelmalek Sayad,le sociologue se fait écrivain public. Il donne la parole à ceux qui en sont le plus cruellement dépossédés. Pierre Bourdieu, 1991.
Trente années d'enquêtes réalisées par le sociologue Abdelmalek Sayad (1933-1998) ont renouvelé l'étude
du phénomène migratoire: à l'immigration dans une société correspond toujours une émigration hors d'une autre société. L'une ne peut s'expliquer sans l'autre.
Ce premier volume de L'immigration ou les paradoxes de l'altérité montre que la présence d'étrangers dans un espace national est toujours pensée comme provisoire, alors même que la réalité dément cette représentation. La dimension économique de la condition de l'immigré détermine tous les autres aspects de son statut: le travail fait
« naître» l'immigré mais rend sa présence illégitime quand l'emploi vient à manquer. Lillusion du provisoire
se prolonge dans le logement, avec ces foyers qui assignent durablement leurs résidants à un habitat temporaire. Elle se perpétue enfin dans l'idée du retour, qui entretient l'espoir que l'exil n'a qu'un temps.
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Étonnant paradoxe : dans l'actualité, même les bonnes nouvelles se transforment systématiquement en mauvaises. Ce qui accrédite l'idée de déclin et de décadence, semblant appeler d'urgence un traitement de choc.
Plusieurs grands dossiers, comme la mutation du travail, la recomposition du lien social ou encore la question démocratique, peuvent être revisités sous cet angle. Ainsi, la transformation de sociétés essentiellement fondées sur le travail en des sociétés plus libres et toujours plus riches devrait passer pour une bonne nouvelle. Nous avons réussi l'exploit d'en faire le grand mal du monde industrialisé, avec son cortège de chômage, de précarité et de misère. De même, un développement économique plus centré sur le capital humain, la formation, la santé, est porteur de nombreuses promesses. Or santé et formation n'apparaissent pas comme les ressorts d'une nouvelle croissance mais comme des charges budgétaires insupportables.
Comment a-t-on réussi à transformer des solutions en problèmes ? Roger Sue propose un nouveau regard sur les causes de ce paradoxe, qui mêle retard culturel, absence de recul et de perspective historique, conservatisme politique et défense des privilèges des élites, que le discours de la peur ou la politique du pire semblent trop bien servir. Contre l'intérêt de la société elle-même.
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Les biographies de philosophes ne sont le plus souvent que de simples chronologies qui informent de la venue au monde d'un génie, de ses avatars humains et de l'irruption de ses fulgurations intellectuelles. Pierre Bourdieu relevait ainsi que les philosophes des livres de philosophie sont des individus qui ne lisent pas le journal le matin et que, s'ils le font, cela ne souille en rien l'exercice souverain de leur pensée. Ce n'est que lorsqu'il s'agit de s'en prendre à un philosophe que l'on invoque les processus socio-historiques dans lesquels sa pensée s'est formée. Pour un philosophe, être historicisé est, en général, un symptôme de son dépassement : il s'agit de montrer que sa pensée est devenue caduque avec l'époque qui l'a vue naître.
À l'encontre de cette auguste tradition, l'auteur de ce livre explique, en sociologue, comment Foucault est devenu Foucault. Si un grand penseur est moins un génie qui appelle des dithyrambes impétueux, qu'un individu capable de concilier des mondes théoriques différents dans une perspective qui lui est propre, de travailler son expérience sociale sans relâche jusqu'à trouver un biais qui soit le sien, ce livre aide à comprendre comment Foucault a réussi à devenir Foucault. Quand le travail scientifique décrit, avec les données disponibles - existentielles, sociales et intellectuelles - la manière dont le génie se construit socialement, il ne s'agit évidemment pas de dénigrer un grand philosophe. Tout au contraire, il s'agit de montrer ce qu'il lui en coûta et, bien sûr aussi, ce qui lui facilita la tâche.
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Ecce homo, voici l'homme, voici le témoin, le médiateur privilégié et pourtant si fragile de la vérité. Car de quelle vérité le témoin est-il médiateur? Il pourrait bien s'agir d'une vérité flatteuse pour l'émotion mais sans doute bien moins pour la raison.
La tentation esthétique conduit souvent à enjoliver la réalité et à tomber dans l'apologie ou l'hagiographie. Sans compter le faux témoignage ou le contre-témoignage. Fragile est donc le témoin et d'autant plus fragile est sa vérité - toujours noué charnellement à son propos sans pour autant se confondre avec ce dont il témoigne. Le témoin n'a d'ailleurs rien de nouveau à dire; tout est dans sa façon de le dire. C'est ainsi qu'une histoire singulière est touchante et devient susceptible d'en engager d'autres. Aussi, en plus d'une esthétique, il faut rappeler une éthique du témoignage qui apparaît alors comme le préalable à toute éthique de la discussion pour notre temps.
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La thèse de la mort de Dieu a obsédé, et obsède encore, la philosophie contemporaine depuis Nietzsche au moins, au point qu'il semble que nous devions comprendre notre temps comme celui d'un deuil paradoxal, parce que sans fin, à la mesure de son objet infini. Toutes les considérations sur le désenchantement du monde, la fin de la représentation symbolique, la perte du sens, l'évanouissement de toute perspective eschatologique, voire la fin de la religion, indéfiniment reprises et répétées, en sont la conséquence. Il ne faut cependant pas prendre cette thèse à la légère. Il faut en mesurer tout le poids pour en évaluer la portée : la destitution de Dieu, l'annulation de la transcendance ou de l'ex-cendance, pour reprendre une expression d'Emmanuel Levinas, au-delà des êtres, au-delà même de l'être. La thèse veut dire la chose suivante : Dieu est mort, parce qu'il n'aura jamais vécu qu'une vie de représentation, dans la croyance, la foi ou le concept, en tout cas dans l'esprit de l'homme. Il n'aura vécu que la vie que l'homme lui aura prêtée. L'homme et Dieu se faisant ainsi face, il n'est pas étonnant que la thèse de la mort de l'homme ait suivi de près celle d'un Dieu qui n'est plus désormais conçu comme son créateur, mais simplement comme sa créature. La pensée contemporaine peut à certains égards se ramener à cette inversion des rôles et à cette double mort. Mais par là même notre temps ne peut esquiver une question majeure, celle qu'il convient absolument de poser : comment surmonter le nihilisme ? Comment surmonter un nihilisme - qui prend parfois la figure de nouveaux dieux - dont la forme extrême a conduit le XXe siècle à la catastrophe, à la barbarie inouïe ?
Cette interrogation constitue l'horizon à partir duquel la question philosophique de Dieu se trouve ici reposée à nouveaux frais. Que reste-t-il de ce que les philosophes ont dit de Dieu ? Que reste-t-il d'un savoir de Dieu, d'un savoir de celui qui dépasse tout savoir ? N'y a-t-il là qu'une prétention exorbitante, une illusion qui a traversé la plus grande part de l'histoire de la philosophie ? A l'inverse, les manières dont les philosophes ont pensé Dieu ne sont-elles pas susceptibles de frayer de nouveaux chemins à la pensée vers l'altérité, la transcendance ? Ne peut-on y trouver un rempart contre des formes de sacralisation nouvelles du séculier qui capturent la subjectivité ou manipulent politiquement les volontés ?
L'ambition de ce volume est de restituer l'interrogation philosophique sur Dieu dans sa diversité, sa force et ses métamorphoses, hier et aujourd'hui.
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402« Il faut changer de société », dit-on souvent et on a bien raison, car celle où nous vivons est souvent irrespirable. Mais, pour y parvenir, il faut peut-être d'abord s'efforcer de changer la notion même de société. En effet, il y a maintenant une tension de plus en plus forte entre pratiquer la sociologie, penser la politique et croire en l'idée de société. Afin de trouver une issue, ce livre veut d'abord pousser cette tension à bout.
C'est pourquoi il faut distinguer deux définitions du social. La première, devenue dominante dans la sociologie, présente le social comme l'ombre projetée par la société sur d'autres activités, par exemple l'économie, le droit, la science, etc. Dans cette optique, le social ne change jamais puisque la société est toujours déjà là, et le sociologue peut tranquillement continuer à produire des « explications sociales ». La seconde préfère considérer le social comme l'association nouvelle entre des êtres surprenants qui viennent briser la certitude confortable d'appartenir au même monde commun. Dans ce second sens, le social se modifie constamment ; pour le suivre, il faut d'autres méthodes d'enquête, d'autres exigences, d'autres terrains. C'est grâce à eux qu'il sera possible d'étudier les nouvelles « associations », toujours imprévues, entre, par exemple, les virus, les pénuries, les passions, les innovations techniques, les pays émergents, les rumeurs, les catastrophes naturelles, etc.
C'est à retracer le social comme association que s'attache depuis trente ans ce qu'on a appelé la « sociologie de l'acteur-réseau » et que Bruno Latour présente dans ce livre. Sa proposition est simple : entre la société et la sociologie, il faut choisir. De la même manière que la notion de « nature » rend la politique impossible, il faut maintenant se faire à l'idée que la notion de société, à son tour, est devenue l'ennemie de toute pensée du politique. Ce n'est pas une raison pour se décourager, mais l'occasion de refaire de la sociologie.
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Logiques des mondes, auquel Alain Badiou travaille depuis une quinzaine d'années, est conçu comme une suite de son précédent « grand » livre de philosophie, L'être et l'événement, paru aux Éditions du Seuil en 1988. Mais que veut dire « suite » ? En 1988, le propos ontologique consistait, avec l'appui des mathématiques, à établir que l'être, pensé comme tel, n'est que multiplicité indifférente. Le problème devient alors le suivant : comment, sur fond de cette indifférence, comprendre, non seulement qu'il y ait des vérités, mais qu'elles apparaissent dans des mondes déterminés ? Qu'est-ce que le corps visible, ou objectif, d'une vérité ? Cela ne se laisse pas déduire de l'ontologie. Il faut construire une logique de l'apparaître, une phénoménologie. Telle est la visée du présent livre : une « Grande Logique » qui, rendant raison de l'ordre des mondes, autorise la pensée des vérités comme exceptions à cet ordre. Le matérialisme contemporain soutient qu'il n'y a que des corps et des langages. La dialectique matérialiste, ici argumentée dans ses moindres détails, affirme, elle : oui, il n'y a que des corps et des langages, sinon qu'il y a des vérités. Ce n'est que sous l'effet de ce « sinon que » qu'est encore possible une vie qui ne soit pas indigne. Une vie où l'individu démocratique s'incorpore à ce dépassement de sa propre existence qu'on appelle un Sujet.
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