À lire comme on lit un roman policier : comme une analyse complexe mais systématique qui vous entraîne là où vous ne voudriez pas aller. L'argumentaire met aux prises philosophes (Spinoza, Kant, Hegel, Althusser, Derrida, Habermas, Honneth), historiens du moderne (Brenner, Meiksins Wood) et du global (Wallerstein, Arrighi, Sassen), Schmitt, Bourdieu et Foucault. Il fait apparaître qu'émerge, derrière notre dos, un État-monde de classe articulé au Système-monde impérialiste. Une anti-utopie, donc. Une thèse réaliste, qui n'est pas celle d'un État mondial.
Ou bien comme on lit un recueil de nouvelles liées les unes aux autres : comme autant de mises en perspective du même sujet. On peut ainsi scruter chaque chapitre pour lui-même. Les uns s'adressent aux économistes, d'autres aux sociologues et aux politologues, d'autres encore aux féministes, altermondialistes, théoriciens du discours ou chercheurs du postcolonial, d'autres enfin aux historiens, juristes ou géographes. Ils prennent chaque destinataire sur son terrain «scientifique» particulier. En y impliquant chaque fois le philosophe, c'est-à-dire aussi le citoyen.
Il n'y a qu'une seule idée, un seul paradigme : une théorie. Il s'agit bien sûr de transformer le monde, mais en commençant par le comprendre, là où Marx a en partie échoué. C'est donc aussi une refondation du marxisme qui est proposée.
Ce livre est le quatrième d'un ensemble publié aux PUF - Que faire du Capital ?, 1985, Théorie Générale du droit, de l'économie et de la politique, 1999, Explication et reconstruction du Capital, 2004 - qui a fait l'objet de traductions en une dizaine de langues étrangères.
Le lecteur rencontrera dans les textes ici rassemblés certains des thèmes et des problèmes liés à l'interprétation, qui lui assurent une place dans la discussion philosophique contemporaine. Ils abordent la question du statut des sciences de l'homme, de la connaissance littéraire et de la logique de l'interprétation. Entre les positions extrêmes d'un scepticisme tendant à reconduire toute connaissance à une interprétation qui en vaut bien une autre et d'un réalisme considérant que l'on peut toujours retrouver, sous le vernis des interprétations, la « vérité » des « faits », se déploie une « logique des positions » qui définit les conditions de la connaissance herméneutique.
Comment comprendre que la venue historique du Verbe en chair, Jésus de Nazareth, récapitule toutes les dimensions entendues sous l'expression « théologie de l'histoire. », à savoir le devenir historique de l'humanité, l'originalité et le caractère absolu du fait chrétien, le sens chrétien du temps, l'harmonie des deux Testaments, la signification du temps de l'Église, l'achèvement de l'homme dans l'histoire, l'espérance chrétienne et la destinée ultime des créatures ? Pour les chrétiens, bien qu'il appartienne à une époque révolue, Jésus-Christ reste la clé de la totalité du développement historique. Une telle affirmation peut-elle être autre chose qu'une conviction arbitraire sans fondement rationnel ? Si, en revanche, elle n'est pas absurde, cette affirmation n'a pas seulement une conséquence sur la manière de concevoir la succession des époques et des âges. Elle induit une manière concrète d'habiter le temps, celui du quotidien, mesuré par les horloges et le calendrier. Hans Urs von Balthasar (1905-1988), en proposant sa Dramatique divine (1973-1983), éclaire, par la médiation du théâtre comme genre littéraire et comme performance en scène, l'originalité propre à l'intelligence chrétienne du temps décisif, le temps de la vie du Christ, temps définitif accompli et modèle de la temporalité chrétienne. Le temps et l'histoire sont bien développés selon le schéma linéaire d'un avant et d'un après Jésus-Christ. Mais ils sont également conçus comme disposés autour de ce centre. À la croisée d'un temps mesuré par le chronomètre et d'un temps qualifié par l'apparition et la rencontre des personnes, la représentation théâtrale donne à comprendre la validité esthétique, dramatique et théologique d'une conception à la fois linéaire et concentrique du temps et de l'histoire.
« Ce volume, qui est la première étude systématique d'Eckhart et de Nicolas de Cues, portera beaucoup de fruits dans les décennies à venir. Sans chercher à opposer pas plus qu'à identifier ces deux auteurs, la présentation qui en est faite, en lien avec leurs sources et leur influence, met en évidence le réseau complexe des relations entre eux, de manière tout à fait nouvelle et ouvre ainsi de larges champs à la recherche. C'est pourquoi, l'Encyclopédie des mystiques rhénans d'Eckhart à Nicolas de Cues et leur réception est une contribution originale à la recherche sur la pensée du Moyen Âge tardif et un apport substantiel à l'histoire de la philosophie et de la théologie médiévales. Les lecteurs trouveront dans ses pages tout un déploiement - une nourriture pour la pensée, pas seulement à propos des grands luminaires de la tradition médiévale, mais aussi pour des questions qui continuent à se poser à tous ceux qui s'interrogent sur le sens de Dieu et de l'humanité. »
Bernard McGinn, Université de Chicago, Préface.
Cette Encyclopédie est au coeur d'un ensemble d'ouvrages, constitué notamment par deux Anthologies, l'une des mystiques rhénans, l'autre de Nicolas de Cues, ainsi que d'un volume sur L'Iconographie des mystiques rhénans. Vladimir Lossky, lui qui a présenté magistralement la Théologie mystique de l'Église d'Orient et rédigé sa thèse en Sorbonne sur Eckhart, reconnaissait dans l'oeuvre de celui-ci « l'apogée de la théologie mystique de l'Église d'Occident ». C'est également l'originalité et la profondeur des textes d'Eckhart (souvent appelé le plus grand mystique du Moyen Âge), de Jean Tauler, d'Henri Suso et de Nicolas de Cues, qui nous ont fait donner ce titre à cette vaste entreprise franco-allemande, qui rassemble une centaine d'auteurs.
Ce livre tente de montrer que la «crise des religions», visible à travers la poussée fondamentaliste, vient d'une disjonction croissante entre religion et culture(s). Le religieux demeure pour ainsi dire isolé, sorti des cultures traditionnelles où il est né, écarté des nouvelles cultures où il est censé s'intégrer. De cette schizophrénie naissent, selon Olivier Roy, la plupart des phénomènes religieux «déviants» qu'on peut observer aujourd'hui.
Il en résulte une approche très neuve du phénomène religieux, avec des questions essentielles reposées par notre actualité : quel rapport entre religion et culture, religion et civilisation ? Mais d'abord : qu'est-ce qu'une culture, une civilisation ? La culture doit-elle être en opposition ou en accord avec le fait religieux ? Que fait-on de la culture de celui qu'on veut convertir ? Que devient la religion de celui qui est déraciné de sa culture d'origine ? Comment la culture mondialisée transforme-t-elle le religieux ? De nombreux exemples, pris dans l'islam et le christianisme contemporain, illustrent une réflexion qui explique la conjoncture religieuse étrange de notre temps.
S'il est inéluctable que les circonstances mettent l'orientaliste au contact de sujets très variés où l'aspect littéraire n'est pas le seul en présence, doit-on se contenter de ce caractère fortuit ? N'y a-t-il là une voie méthodologique spécifique à creuser ?
Communément l'islamologue a toujours tranché les questions de sens et d'interprétation, et le littéraire a travaillé les formes d'écriture, le rythme de la langue et l'innovation dans l'expression. Il y a là une espèce de dialectique entre le « technicien » et l'« artiste » qui rappelle celle du « principe de réalité » et du « principe de plaisir » de la psychologie des profondeurs. L'histoire comparée de l'islamologie et des disciplines linguistiques et littéraires, depuis le XIXe siècle, nous a installés dans cette dichotomie où aucun espoir de transversalité ni de simple passerelle n'est offert ou même suggéré.
Depuis trop longtemps, c'est sur une sorte de gnose du langage qu'islamologues et littéraires ont assis leur magistère. Chacun s'activant dans son champ, ils en ont oublié le principe fondamental dans l'immense univers des humanités : la mise en perspective de chaque domaine par rapport à l'autre. Le raffinement littéraire d'une part, et la complexité islamologique de l'autre, ne devraient pas faire l'objet d'un rejet de communion active des deux, mais plutôt d'un déplacement de l'un vers l'autre. N'est-il pas possible de rapprocher davantage l'islamologie de la littérature (si spécifique en arabe) ? de mettre au service de la littéralité du texte-source de l'islamologue tous les procédés de la langue-cible du littéraire ?
Au cours du XXe siècle, un modèle social s'est imposé en France au prix de luttes parfois dures et longues. Beaucoup d'intelligence et de pugnacité ont été nécessaires pour penser et mettre en oeuvre une architecture pertinente, à la hauteur des enjeux. Celle-ci repose notamment sur quatre principaux registres interdépendants : les droits, les institutions, les savoirs et les actes de métier.
Or les politiques mises en oeuvre ces dernières années opèrent une dislocation de ces différents registres, au nom du pragmatisme, de l'individualisation ou de la performance. En outre, la recherche effrénée d'économies s'accompagne d'un lot de publicités mensongères (qualité, libre choix, droit opposable...). Un intense travail de remise en cause des représentations du social et des valeurs de solidarité est passé par là, contribuant à affaiblir les pratiques de terrain et la culture politique propres au champ social, malgré la remontée préoccupante des inégalités. Comment y résister collectivement ?
Poursuivant la réflexion entamée dans Trop de gestion tue le social (La Découverte, nouvelle éd. 2010), Michel Chauvière montre ici que notre héritage juridique, institutionnel, cognitif et professionnel, loin d'être la cause d'inutiles dépenses publiques et d'un assistanat chronique, constitue au contraire une ressource incontournable pour apporter une réponse solidaire et globale à la question sociale qui nous interpelle tous.
Près d'un milliard de personnes vivent avec moins de un dollar par jour. Les politiques destinées à lutter contre la pauvreté semblent souvent incapables d'améliorer leurs conditions de vie. Cet échec pourrait-il être dû aux failles des théories qui sous-tendent ces programmes plutôt qu'au caractère écrasant de la tâche ?
C'est cette hypothèse que défend cet ouvrage. Les experts ont pris l'habitude de décider à la place des pauvres de ce qui est bon pour eux sans prendre la peine de les consulter. Abhijit V. Banerjee et Esther Duflo ont initié la démarche inverse. Plutôt que de s'interroger sur la cause ultime de la pauvreté, ils se sont intéressés aux choix qu'opèrent les pauvres en matière de consommation, de mode de vie et d'éducation afin de tester expérimentalement l'efficacité des méthodes préconisées pour améliorer leur sort. Faut-il subventionner les denrées de base ou privilégier les transferts sociaux ? Vaut-il mieux donner ou vendre les moustiquaires qui protègent du paludisme ? La microfinance est-elle le remède espéré pour sortir des «pièges de pauvreté» ?
À distance des réflexes partisans, ce livre aborde ainsi le défi du combat contre la pauvreté comme une série de problèmes concrets qui, une fois correctement identifiés et compris, peuvent être résolus un à un.
Comment dire la gravité de la crise ? Comment, aussi, reconstruire l'espoir ? Telles sont les deux questions fondamentales auxquelles répond ce livre lumineux et essentiel, en faisant un sort à quelques idées préconçues qui nous empêchent de penser l'avenir.
Non, la crise n'est pas finie et la crise financière n'est que la partie émergée de l'iceberg. Non, le chômage et l'accroissement des inégalités ne sont pas des conséquences de la crise ; ils en sont la cause fondamentale.
Non, la mondialisation n'est pas coupable, même s'il est urgent de l'humaniser.
Non, la croissance ne reviendra pas et il est vital d'inventer très vite un nouveau modèle de développement.
Pour éviter que l'Histoire ne se répète.
RTBF, le désamour analyse les récentes évolutions de la RTBF et dégage des pistes de retour aux fondements du service public.
L’omniprésence du sport-spectacle, du divertissement-paillettes et des séquences « bricolage » ou « cuisine » contraste avec les horaires confidentiels d’autres émissions sous-financées. Celles-ci concrétisent pourtant diverses obligations assignées au média dont le budget est aux trois-quarts supporté par une dotation publique.
Un rééquilibrage des missions de la RTBF s’impose absolument. Mais est-il envisageable aussi longtemps que la direction du service public vit sous la pression publicitaire qui ne cesse de se renforcer ?
En 2013, la RTBF appliquera son nouveau « contrat de gestion » qui se négocie avec le gouvernement durant l’année 2012. Une période durant laquelle les téléspectateurs et la société civile auront l’occasion de s’impliquer. Ainsi, le Conseil de la Jeunesse a déjà revendiqué la suppression du « placement de produits » (marques apparaissant désormais dans la plupart des émissions) ou le retour d’un débat de société, comme au temps de l’« Ecran Témoin ».
«Bernard Hennebert, c’est un service public à lui tout seul. Depuis ces décennies qu’il pousse sa grande silhouette dans les lieux divers où il n’est pas forcément le bienvenu, il a surpris, agacé, ému, exaspéré, fait sourire, fait grincer. Mais il a souvent visé juste. Son combat : celui de chevalier blanc de la culture et des médias. Comme Michaël Moore ou Ralph Nader, il est un mal nécessaire ou un bienfait discutable (ça tombe bien, il adore débattre) ». Marc Moulin