Le chapitre manquant d'Ouest
'C'est bien ce qui embarrasse Lambert, que son maître soit mis en doute et que lui, le simple employé, soit comme pris en amitié. Il faut dire, ils se sont trouvé un même goût, Lambert et Victor Hugo. Tous les deux, c'est les chiens, ils les aiment. [...]
Guernesey sort tout juste de la pénombre, les hommes de peine quittent leurs maisons, les pêcheurs. Victor Hugo interroge Lambert sur ses chiens, et leur race et leur taille et leur nom ; s'ils ne vont pas perdre leur conduite, si longtemps loin de leur maître. Il s'y entend, Victor Hugo, un fameux homme, pense Lambert, vraiment un homme de valeur, un connaisseur des chiens. Lux saute autour d'eux. Victor Hugo prend un air grave : Et vos chiens à vous ? Que font, loin de nous, ceux que nous aimons ? Ils se penchent tous les deux, Hugo, Lambert, vers la mer, comme si les chiens des Perrières allaient surgir de la mer, en meute, par l'est.'
Dérive faisait partie d'une version intermédiaire du roman Ouest, paru en 2006 aux éd. Viviane Hamy. Dans l'économie du récit lui-même, il est apparu à François Vallejo que ces pages ne devaient pas figurer dans la version définitive.
Pour l'éditeur, cependant, cet épisode possédait une existence autonome forte. Et il aurait été bien fou de se priver sans retour de la rencontre entre la figure de Victor Hugo et les personnages de Ouest...
Présentation de l'éditeur
À l'aube du XXe siècle, Jean Paulhan vint vivre à Madagascar : « Il y a des pays de collines rouges où l'on trouve de petits lacs verts. C'est un pays tout à fait bien. Et puis on est libre » confiait-il alors à un ami. Nommé au nouveau Collège de Tananarive - que venait de fonder le Gouverneur général Augagneur -, le jeune professeur s'intéressa aux Malgaches et à leur langue, recueillir des proverbes traditionnels en passe d'être oubliés, les Hain-Teny, mais se heurta bientôt aux manières des fonctionnaires et des colons. Ces 121 lettres adressées à sa famille pendant les trois années de son séjour forment un témoignage ingénu, souvent critique et parfois visionnaire, sur la vie quotidienne d'une Colonie. Mais Madagascar est surtout le lieu initiatique où le jeune homme rêveur, loin de l'emprise de sa famille et de sa fiancée, passa à l'âge adulte. C'est là aussi que s'enracina son goût pour le langage et ses secrets pouvoirs...
« Il fait froid chez nous ce soir », écrivait-il à sa mère en juillet 1909. « Maintenant la nuit est venue. Tout à l'heure Autret [son colocataire] va rentrer et nous dînerons. [...] Puis nous descendrons dans la ville et dès que nous aurons dépassé le palais de la Reine il fera brusquement très chaud. Alors nous nous arrêterons de courir. Nous ne fumerons pas mais nous marcherons très doucement et nous causerons avec les gens sur la route. / Nous passerons entre le collège et les arbres du jardin d'Andohalo. [...] Quand nous serons au bout du jardin, je dirai à Autret : « Allons-nous à Antaninarenina ? » C'est le beau quartier, celui de la résidence et des XXX des gens bien. ' Non, dira Autret, il ne faut pas nous accoutumer au luxe. ' Alors nous ferons encore un grand tour par de petites rues, dans du sable et des tas de cendres, avec une lanterne à la main. / Souvent nous nous sommes déguisés en malgaches, les pieds nus dans des sortes de sandales de moines, en grand lamba, et la figure un peu noircie. et nous avons causé, quelquefois, avec d'autres malgaches sans être reconnus. Nous étions fiers. »
Présentation de l'éditeur
Ahmed Rassim (1895-1958) est l'un des plus originaux et des plus doués des écrivains égyptiens d'expression française. Créateur entre deux mondes, pensant en arabe et écrivant en français, il est l'auteur d'une ?uvre aujourd'hui injustement oubliée.
À la lisière du surréalisme, son ?uvre poétique mêle la tradition de l'Orient à une esthétique occidentale. Ses personnages de fiction, ceux du Petit Libraire Oustaz Ali ou du Journal d'un pauvre fonctionnaire, nous apparaissent aujourd'hui comme des anti-héros proches de ceux d'Albert Cossery, empreints de sensualité, de sagesse et de fatalisme. La réédition de ces Oeuvres permet de découvrir celui que Georges Henein appelait «un grand seigneur qui fit v?u de poésie».
Ce volume inédit est accompagné d'un appareil critique et de présentations qui situent l'?uvre de Rassim dans le contexte de l'Égypte des années 1930-1950.
Présentation de l'éditeur
Ce lexique (80 entrées) est écrit sur un ton tour à tour précis, attendri, grave, primesautier. Bien que délibérément subjectif, il est assez documenté, nourri d'expériences vécues et de franches rencontres pour permettre aux lecteurs d'attachement de mieux saisir les quelques beaux enjeux d'un métier assez peu célébré.
Depuis hier, aujourd'hui, mais également pour demain, le livre - qui est, plus que jamais, en question - a tout à gagner à être mis entre de bonnes mains par des gens de généreuse compagnie pour qui la lecture est, plus encore que la profession, une véritable façon d'être.
Présentation de l'éditeur
'La fête chez les Stones bat son plein, je fais un tour rapide de la cour puis un tour du jardin, Angie n'est pas là. Il y a comme toujours certains habitués et quelques nouvelles têtes, maintenant je connais à peu près tout le monde. Ils ont invité un nouvel orchestre qui tape sur des steel pans. J'aime bien les sons rauques de ces bidons d'essence rétamés et vernis, toujours un peu faux, les musiciens qui jouent aujourd'hui viennent de Trinidad. Je suis venu donner mon adresse à Angie, j'ai écrit une lettre. Je vais pour la glisser sous la porte quand je devine quelqu'un debout derrière mon dos.'
Présentation de l'éditeur
Ce livre a été écrit sous les balles. C'est-à-dire que les balles sifflaient devant ma fenêtre. J'habitais, au moment de la libération de Paris, en août 44, un hôtel du Quartier latin, dans une rue adjacente à la rue Soufflot où se sont produites plusieurs escarmouches.
C'est précisément à cette période-là que, bloqué dans ma chambre, n'osant mettre le nez à la vitre, j'écrivais Elisabeth. En même temps, je me posais la question : 'Est-il possible d'écrire sur les événements présents ?' Ma réponse était : 'Non, on ne peut pas, il faut du recul.'. Et je n'ai pas changé sur ce point. E.R.
Présentation de l'éditeur
Une nuit rouge, incendiaire au cours de laquelle se dessine une généalogie troublante, improbable : un père aventurier aux multiples destinées, une mère réfugiée dans des souvenirs enchanteurs, des animaux fantastiques, des enfants retournés à l'état sauvage, un secret si lourd qu'il ne peut être dit. Joseph Orban nous convie à un parcours haletant à travers un univers où tous les possibles s'entremêlent dans une langue poétique, sublime et hallucinée, qui tient autant de Claude Simon que d'André Baillon.
Un enfant, reclus dans un domaine à l'abandon où la nature a recouvré ses droits, nous raconte le paradis sanguinaire et merveilleux dans lequel lui, ses frères et soeurs vivent. Doit-on croire cet enfant qui nous parle ? Doit-on, à notre tour, prendre en haine ceux qui refusent de comprendre, ces gens qui usent encore des mots ?
Car, après tout, les gens disaient l'étable...
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« Quelque chose est là tout à coup qui lui dit, lui répète qu'il existe un malheur plus grand que le malheur : la spoliation de ce malheur, et que personne, fût-ce avec l'excuse des bonnes intentions, l'excuse de la Charité et même celle de l'Amour, personne, non, personne n'est en droit de l'en déposséder. »
Trois personnages au sortir de l'enfer, une jeune femme et deux jeunes hommes, s'unissent, par l'entremise d'un quatrième et la magie d'un Livre, pour déjouer le Complot du Déni.
Présentation de l'éditeur
maternA est l'un des chefs-d'oeuvre d'Hélène Bessette, publié pour la première fois en 1954 et jamais réédité jusqu'à aujourd'hui. maternA avec un A capital final car « le A est l'enfance de la vie » écrit l'auteur. Ainsi toutes les héroïnes portent-elles des noms se terminant en A. Ce détail poétique au sein d'un roman de trame classique symbolise le style d'Hélène Bessette : avec humour et audace, il sollicite la curiosité du lecteur sans troubler ses repères et en exacerbant le plaisir de la lecture.
Les personnages, institutrices, se sentent prisonnières d'un métier qu'elles ont honte de détester. Leurs rivalités et leurs névroses apparaissent en révélant leurs stratégies de survie quotidienne, d'un comique désespéré. On découvre la passion quasi amoureuse de l'une d'entre elles pour sa directrice tandis qu'une nouvelle venue, ne correspondant pas au moule de ses collègues, se voit publiquement méprisée jusqu'à l'humiliation, ce qui menace à la fois sa carrière et sa vie sentimentale. L'une des intrigues est focalisée sur ce personnage détonnant dans le paysage consensuel, miroir de l'auteur. Parviendra-t-elle à échapper aux griffes de ses collègues jalouses ou sera-t-elle broyée par le système ?
Présentation de l'éditeur
Vienne brûle. Trois jours et trois nuits. Le narrateur observe. L'incendie réveille en lui des souvenirs qui le lient à six maisons réduites en cendres, en réalité six femmes.
Il ignorait alors ce que chacune d'elle désirait de lui une fois la porte franchie : désir d'étreinte ou désir de dévoration ? Au coeur du désastre, il rencontre aussi le photographe Robert Frank, avec qui il a un entretien presque imaginaire. « J'ai longtemps pensé que ce que je cessais de voir cessait d'exister. Plus tard, j'imaginais ce qui pouvait se dire lorsque je ne parlais plus. Est-ce que la parole continue de parler lorsque je cesse de parler ? Où est ma voix dans mon corps ? Il faut entendre ce que la parole ne dit pas. »
Le grand incendie de l'homme, c'est la femme.
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