Jusqu'à son éradication en 1709, l'abbaye de Port-Royal des Champs aura représenté - face à Versailles, à la cour de Louis XIV, aux jésuites et à la papauté - un symbole d'indépendance et d'inviolabilité des consciences. C'est pourquoi cette histoire (de famille, de clan, de femmes surtout) est celle d'une persécution acharnée, mais aussi d'une clandestine activité de préservation.
Au centre de celle-ci, Françoise de Joncoux, surnommée « l'Invisible », patiemment déchiffre et recopie les manuscrits du monastère, maintient le lien entre les membres de la communauté dispersée, sauve de l'anéantissement l'oeuvre édifiée par tant de moniales et de leurs amis - Blaise Pascal et les « Solitaires ».
Proche de Françoise de Joncoux : Claude Dodart, certes praticien à la cour, mais fils d'un médecin de l'abbaye. Ou encore Marie-Catherine Racine, en quête d'un manuscrit introuvable de son père, l'illustre Jean Racine, et de vérité sur celui-ci - ami ambigu de Port-Royal, qui y fut élevé, s'en éloigna, l'y laissa elle-même entrer, l'en retira de force... mais voulut y être inhumé.
Traversé de multiples prises de parole, revécu par celles qui ont « fait » ou approché Port-Royal, bruissant de mémoire et empli de probité dans la fiction, le roman de Claude Pujade-Renaud embrasse l'histoire d'un lieu de grâce que le pouvoir temporel n'eut de cesse d'opprimer, détruire et transformer en désert - au risque même d'en faire un mythe.
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Ouest de l'Afghanistan, 2 juin 2004. En bordure des champs de pavot, deux hommes attendent, armes à la main. Dans quelques instants, le véhicule 4 x 4 de Médecins Sans Frontières arrivera à leur hauteur, et ils feront un carnage. Cinq morts, des dizaines de douilles au sol, un ciel métallique et radieux pour mieux souligner le drame. Dans cette vallée de Qadis, entre l'imam, le pharmacien, le chef de la police et les fermiers, entre le seigneur de guerre et son cousin le gouverneur, se joue un bras de fer qui plonge ses racines dans la guerre aux talibans, mais se prolonge désormais dans les ports de Karachi, Chittagong et New York. Le commerce de l'héroïne, bien sûr. Mais s'il ne s'agissait que de cela... Dans ce «romanquête», tous les faits connus sont scrupuleusement respectés. L'auteur ne s'est octroyé que deux libertés : celle d'assembler ce kaléidoscope, puis de laisser courir une plume qui transmette toute la passion amoureuse que mérite l'Afghanistan.
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Est-ce vraiment une chance d'avoir des parents révolutionnaires ? Savoir son père en prison, loin dans le Sud, et marcher seul, telle est la vie du jeune Driss. Il porte les légumes du marché, ceux que sa mère choisit avec soin entre deux distributions de tracts. Il garde en lui toute une histoire, belle mais un peu lourde pour son âge, celle d'une génération qui a lutté, les armes à la main, pour la démocratie au Maroc. Et pour les droits des immigrés en Belgique.
À Rabat, Driss retrouvera un jour son père au milieu d'une société débrouillarde, ingénieuse. Le soleil éblouira le détenu fraîchement libéré, et celui-ci parlera. Mais surtout, Driss tombera amoureux d'une fille aux cheveux très courts, qui lui apprendra à tisser une toile nouvelle, résistante mais légère.
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Avec cette saga familiale qui se déploie sur près d'un siècle, Diane Meur confirme son formidable talent de romancière.
En Galicie, terre rattachée à l'empire habsbourgeois depuis le partage de la Pologne, l'obscure famille Zemka reconquiert le domaine fondé par un ancêtre noble et s'engage fiévreusement dans la lutte d'indépendance polonaise. Pour retracer son ascension puis sa décadence, l'auteur convoque une singulière narratrice : la maison elle-même qui, derrière sa façade blanche et son fronton néo-classique, épie ses habitants.
Indiscrète et manipulatrice, elle attise les passions, entremêle les destins, guette l'écho des événements qui, des révolutions de 1848 aux tensions annonciatrices du désastre de 1914, font l'histoire de l'Europe. Elle est partout, entend tout, garde en elle toutes les ombres d'un passé qu'elle connaît mieux que les vivants. Mais les vivants ont sur elle un avantage qu'elle leur envie : leurs drames, leurs désirs et leur mobilité.
Les femmes surtout la fascinent. Condamnées comme elle à la réclusion dans la sphère domestique, elles sont réduites, de mère en fille et de tante en nièce, à attendre l'amour en scrutant l'horizon.
Mais l'horizon, c'est toujours la plaine, les champs, le clocher de la petite église uniate. Les arbres poussent, les vies se nouent et on dirait que rien ne change... Rien ne change, vraiment ? Pourtant, voilà qu'on se trouve au seuil du XXe siècle avec l'impression d'en avoir déjà entrevu les exodes, les cassures et les embrasements.
Une jeune femme, enfin, réussira à s'en aller...
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Paris, une semaine de mai caniculaire. Du lundi au samedi, dans les alentours de l'église Saint-Sulpice, à l'occasion d'un mariage et d'un enterrement une vingtaine de personnages principaux vont se croiser, se heurter, s'aimer, se quitter; certains verront des projets essentiels se réaliser, d'autres s'effondrer tout espoir... Le roman explore, dans un enchaînement de plans successifs, ces vies tressées avec une exceptionnelle virtuosité, formant la trame d'une réflexion à la fois jubilante et profonde sur l'amour et sur l'art.
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Fin de printemps 40 en France. Sur une des routes de l'exode se traînent à pied un proxénète, Saint-Jean, et trois putes, dont l'une, aveugle, allaite un nourrisson. Mais le bébé meurt et Saint-Jean le remplace par un autre trouvé dans une valise abandonnée. C'est le début d'une folle histoire d'amour entre lui et l'enfant... La petite troupe trouve bientôt son paradis en pleine déroute dans un lieu magique fait de marais et de légendes au bord d'un fleuve. Là, à la Riviera, énorme baraque rouge et biscornue que Saint-Jean transforme en boxon, le petit Pierre grandit avec comme soleils l'ombre noire du mac, la lanterne rouge du bordel et les yeux sans amour de sa mère aveugle... Mêlant le merveilleux d'un conte au réel de la guerre, Richard Morgiève met en scène une faune joyeuse de Français du cru et interprète avec une sauvagerie visionnaire les dessous d'une défaite historique subtilement éludée par notre mémoire nationale.
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New Valley, 2016. Immeubles en ruines. Fenêtres murées. Trafic des âmes et pneus en flammes au coin des rues. Dans cette métropole à l'agonie, moi, Randall Hollister, cocaïnomane né de père inconnu, j'ai tué ma mère. Pour son bien, pour le mien.
Puis je suis parti. Je voulais mettre de l'espace entre cette violence et moi.
En réalité, c'est à travers le temps que j'ai fui. Je me suis glissé dans ses replis, mon cerveau malade ignore par quel prodige. Je suis arrivé en 1961, dans une petite ville de banlieue. Propre. Riche. Le bonheur comme dans un catalogue. Allées fleuries, maisons à perron, Ford et Chevrolet grandes comme des péniches brillant au soleil, réfrigérateurs pleins qui ronronnent. Me voilà en plein âge d'or de la consommation. Golden Years. Comment cette société parfaite a-t-elle pu engendrer l'époque délabrée qui vu naître ? Je le découvre en assistant à la chute de la cité modèle dans un gouffre qu'elle a creusé de ses propres mains.
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Si Yaël Koppman n'avait pas croisé, à la faveur de ses travaux universitaires, la figure de John Maynard Keynes, sa vie serait probablement restée ce qu'avec un brin de complaisance et beaucoup de dérision elle dépeint dans son journal intime : celle d'une trentenaire dés?uvrée, cultivant une relation conflictuelle avec sa mère, vivant en colocation avec son meilleur ami, collectionnant les hommes et s'en remettant en général à sa brillante cousine, Clara, éditrice de son métier.
Quand cette dernière lui suggère de se désennuyer en écrivant de la Chick Lit, de la littérature de poulette ? genre qui lui conviendrait parfaitement, glisse la perfide ?, Yaël est piquée au vif : elle écrira, oui, mais sur la filleule de Keynes, son économiste préféré, qui était aussi la nièce de Virginia Woolf, son écrivain préféré. Bien consciente que la figure d'Angelica Garnett, puisque c'est d'elle qu'il s'agit, lui tend un étrange miroir, elle se lance à corps perdu dans des recherches sur cette petite fille qui a grandi solitaire parmi les grandes figures de Bloomsbury, qui a vécu bien malgré elle la vie quasi communautaire de ces fantasques intellectuels des années vingt et assisté à leurs expériences sexuelles.
À travers la vie d'Angelica, c'est bientôt la sienne propre que contemple Yaël, celle de ces enfants des années soixante-dix curieusement frustrés que leurs parents n'aient pas renoncé à leurs utopies. Le constat est acide et sans illusion, et sous couvert d'un aimable récit autobiographique, Le Journal de Yaël Koppman devient le roman au vitriol d'une génération qui, si l'on en croit l'exemple de Yaël, finira par trouver son équilibre.
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Né à Harlem en 1924, mort à Saint-Paul de Vence en 1987, noir, bâtard, homosexuel, écrivain, James Baldwin a combattu sans relâche la ségrégation raciale. Mais ce n'est pas à ce titre que l'admire Alain Mabanckou. Dans cette longue lettre qu'il lui adresse post-mortem, il salue en Baldwin l'esprit libre qui refusa, en littérature comme en politique, que sa lutte mène au repli communautaire. L'hommage épistolaire se mue alors en échange complice ; citations de l'?uvre du maître et commentaires se confondant presque pour rappeler qu'il n'est d'homme qu'universel. Alain Mabanckou et James Baldwin avaient bien des choses à se dire. L'un comme l'autre, ils n'acceptent que deux identités : celle d'écrivain, et celle d'être humain.
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Quelqu'un s'avance là et c'est une femme. Mettons qu'on ne fasse que la regarder et l'entendre. Regarder comment elle parle, entendre comment elle raconte. Non pas ce que ça cache mais ce que ça montre. Quelqu'un s'avance là et tout y est. Le monde entier dans sa voix, ses mots, ses mimiques. Pendant que l'Histoire poursuit son chemin héroïque et vain, un précipité de modernité se pose là et c'est une femme.
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