« Pendant des dizaines d'années, j'ai traversé ce pont deux fois par jour et c'est la première fois que je prête attention aux mouettes, songe-t-il. Je les regarde avec les yeux de cette femme. Elle a les mêmes yeux gris vert que Vautre... des yeux d'oiseau ou d'animal. »
Lorsqu'il accueille dans son bureau du ministère la réfugiée finlandaise venue demander un permis de séjour et de travail, le haut fonctionnaire est saisi : il croit reconnaître une jeune fille jadis aimée et qui s'est donné la mort cinq ans plus tôt par amour pour un autre. Simple hasard ou signe du destin ? Qui est cette « mouette » venue de si loin et qui prétend se nommer Aino Laine, « vague unique » en finnois ?
Cette rencontre énigmatique, dont la tension est accrue par l'imminence de la guerre et l'attente d'un coup de téléphone, crucial pour l'homme comme pour le sort du pays, pourrait déboucher sur une révélation, à moins qu'elle ne fasse qu'épaissir le mystère des êtres.
Comme dans Les Braises, écrit un an plus tôt, ou Divorce à Buda, ce roman où s'exprime la subtilité du grand écrivain hongrois confronte un homme et une femme à leur passé dans un de ces face à face somnambuliques et prenants dont Márai a le secret.
L'ensemble des textes de ce recueil a paru pour la première fois dans des revues entre 1910 et 1914. Poursuivant le thème de l'antinaturalisme qui a fait sa renommée et l'a démarqué singulièrement, Tanizaki met en scène des héros doués d'une certaine perversion dans un climat onirique. Les jeunes garçons est marqué par une liberté de ton et peut être perçu comme une illustration ludique de perversions majeures. L'auteur poursuit cette exploration d'une sexualité en marge dans Le secret et met en scène avec beaucoup de poésie un narrateur las de ses plaisirs, à la recherche de nouvelles expériences. Terreur, que l'on peut lire dans le prolongement des Jeunes garçons, relate ses souffrances intérieures et ce qu'il appelle sa « dépression nerveuse ». Ce motif psychologique, qu'il va revisiter plusieurs fois, illustre de façons différentes La haine et Une mort dorée et accompagne sa recherche de l'idéal esthétique. Tanizaki crée une oeuvre inimitable dans son harmonie, et véritablement emblématique de la position de l'intellectuel japonais du XXe siècle.
Collectionneur d'art, millionnaire, peintre contrarié, Francis Cornish est peut-être bien le faussaire du siècle.
Après sa mort, trois de ses amis tentent d'élucider les mystères de sa personnalité. Mais l'entreprise se révèle bien plus ardue qu'il n'y paraît, car que sait-on vraiment de la vie d'un homme ? Qu'il s'agisse d'administrer le legs Cornish (Les Anges rebelles), d'écrire la biographie du grand homme et de tenter de mettre au jour les zones d'ombre de son existence (Un homme remarquable) ou de perpétuer sa mémoire en mettant en scène un opéra d'Hoffmann (La Lyre d'Orphée), rien ne se passe jamais comme prévu. Le lecteur se trouve alors emporté dans une traversée comique et cruelle du siècle. Il croisera dans son périple une jeune doctorante tzigane au charme magnétique, un moine défroqué et diabolique, deux anges biographes, et E.T.A. Hoffmann lui-même surgi des limbes...
Les trois romans de La Trilogie de Cornish témoignent de l'imagination débridée de leur auteur. Dans un grand éclat de rire, Robertson Davies mêle la théorie jungienne, le tarot, le campus novel et le roman de moeurs, pour prendre place parmi les meilleurs romanciers, ceux qui, comme l'écrivait Nabokov, possèdent le shamantsvo, l'âme du conteur.
Having recalled his life through the story of his physical self in Winter Journal, internationally acclaimed novelist Paul Auster now remembers the experience of his development from within, through the encounters of his interior self with the outer world.
From his baby's-eye-view of the man in the moon to his childhood worship of the movie cowboy Buster Crabbe to the composition of his first poem at the age of nine to his dawning awareness of the injustices of American life, Report from the Interior charts Auster's moral, political and intellectual journey as he inches his way towards adulthood through the post-war fifties and into the turbulent sixties.
Auster evokes the sounds, smells and tactile sensations that marked his early life - and the many images that came at him, including moving images (he adored cartoons, he was in love with films), until, at its unique climax, the book breaks away from prose into pure imagery: the final section of Report from the Interior recapitulates the first three parts, told in an album of pictures.
At once a story of the times - which makes it everyone's story - and the story of the emerging consciousness of a renowned literary artist, this four-part work answers the challenge of autobiography in ways rarely, if ever, seen before.
Mamoon Azam, écrivain d'origine indienne de renommée mondiale, voit sa notoriété décliner à 70 ans passés. Afin de réactiver l'intérêt pour son oeuvre, Harry Johnson se voit confier la mission de rédiger sa biographie. Un travail qu'il accomplit aux côtés de celui qu'il a toujours admiré et de sa nouvelle épouse italienne, dans leur grande demeure de la campagne anglaise. Mais au-delà de l'excitation initiale, l'entreprise se révèle plus qu'ardue. Harry se trouve pris en étau entre les desiderata de Mamoon, soucieux de laisser un témoignage flatteur pour la postérité, et les exigences plus commerciales de son éditeur, en quête de révélations inédites sur la vie privée de l'écrivain.
Avec humour et causticité, Hanif Kureishi lève le voile sur les coulisses de la création et interroge la façon dont se construit une oeuvre, ce qu'il en reste une fois que l'on a écrit ses derniers mots.
En Grande-Bretagne, au début des années 1970, la guerre froide est loin d'être finie. Diplômée de Cambridge, belle et intelligente, Serena Frome est la recrue idéale pour le M15. La légendaire agence de renseignements anglaise est en effet bien décidée à régner sur les esprits en subvenant aux besoins d'écrivains dont l'idéologie s'accorde avec celle du gouvernement. L'opération en question s'intitule Sweet Tooth et Serena, lectrice compulsive, semble être la candidate tout indiquée pour infiltrer l'univers de Tom Haley, un jeune auteur prometteur. Tout d'abord, elle tombe amoureuse de ses nouvelles. Puis c'est de l'homme qu'elle s'éprend, faisant de lui l'autre personnage central de cette histoire.
Mêlant finement réalité et fiction, le romancier souligne l'influence de la littérature sur nos existences, pour le plus grand plaisir du lecteur, qui finira par comprendre que toute cette histoire était avant tout... un grand roman d'amour.
Derrière les barreaux de sa prison, Thanh contemple les derniers lambeaux de brume sur la paroi rocheuse qui lui tient désormais lieu d’horizon. Il a été condamné aux travaux forcés.
Parce que ce jeune homme sans histoire, excellent élève et fils modèle, a découvert très tôt son homosexualité et qu’il lui a paru insurmontable de l’avouer à ses parents, son destin a basculé. Comment il est tombé sous la coupe d’un mauvais garçon avec qui il a fui sa ville natale et comment il s’est retrouvé piégé, c’est le fatal et poignant engrenage que Duong Thu Huong met en scène.
Thanh est désespérément seul pour cette descente dans les cercles de son enfer intime. Il ne peut confier à personne les affres de sa relation avec son compagnon qui, en parfait manipulateur, joue de l’attirance physique qu’il exerce pour vivre à ses crochets. Honteux de sa faiblesse et de sa lâcheté, Thanh se garde bien de demander conseil à Tiên Lai, l’homme mûr en qui il a pourtant le sentiment d’avoir rencontré un alter ego.
À Dalat où ils végètent comme ramasseurs de balles sur des cours de tennis, Thanh n’a pas la force d'éconduire son mauvais génie. Il s'enfuit en vain à Saigon, croyant trouver refuge dans l'anonymat de la métropole.
Si l’issue de cette sombre liaison est bien fatale, Duong Thu Huong écrit pourtant un roman de la rédemption. Son jeune héros, dont les tribulations lui donnent la matière d'une vertigineuse plongée dans le Vietnam de la fin des années 80, ne finira pas au bagne.
Les Collines d'eucalyptus est une somptueuse variation sur le thème du retour de l’enfant prodigue, un roman éclairé par la compassion et l'intelligence humaine qu'un écrivain au sommet de son talent témoigne à ses personnages.
La sensibilité d’une artiste comme Fanny Ardant s’imposait pour présenter Jean Rhys, l’une des plus remarquables romancières britanniques du XXe siècle.
Une Anglaise retourne à Paris où elle a vécu un grand amour. Portée par le hasard des rencontres, elle s’étourdit dans le Montparnasse d’avant-guerre, mais le passé l’envahit inévitablement.
Jean Rhys tire de sa vie dans la bohème des années 20 la substance de ses romans. La romancière a l’art de saisir sans concession et avec humour les infimes émotions, les doutes, les contradictions et les joies qui nous traversent.
Oh mon Dieu, ai-je l’air de ça? Ai-je vraiment l’air d’une riche rombière qui fait un tour à Montparnasse dans l’espoir de…? Après tout le mal que je me suis donné, est-ce de ça que j’ai l’air? Je suppose que oui. Vais-je lui dire d’aller se faire fiche? Mais après tout, me dis-je, voilà peut-être l’occasion de me payer un peu de retour?
New York, Greenwich Village, 1985. Greta Wells, une photographe, est atteinte de dépression : son frère jumeau Felix est mort du sida, et son petit ami Nathan vient de la quitter. Elle entreprend un traitement par électrochocs.
Le lendemain matin Greta découvre qu'elle a changé d'époque - nous sommes maintenant en 1918. Felix est bien vivant, il est fiancé à la fille d'un sénateur et a une liaison secrète avec son avocat, Alan.
Mais la voilà à nouveau projetée dans le temps - en 1941, cette fois. Greta a épousé Nathan, avec qui elle a fondé une famille. Elle fréquente aussi Leo, un homme plus jeune qu'elle. Ces vertigineux allers-retours sont bien plus que des changements d'époque : ce sont des mondes différents que doit affronter Greta, des vies alternatives parmi lesquelles il lui faudra, si elle en est capable, choisir celle qui lui convient. Dans le dédale du temps, une femme cherche son chemin...
Après le succès international de L'Histoire d'un mariage, Andrew Sean Greer nous captive à nouveau avec ce roman magique et précis comme une montre suisse.
« Je travaille pour la presse à scandale, au Standard Evening Sun. Depuis que j’ai ce boulot, je suis sortie avec quatre fils de célébrités, deux hommes d’affaires auteurs de romans inachevés, trois écrivains qui avaient la manie de me demander « Ça te dérange si je m’en sers dans mon livre ? » chaque fois que je faisais une remarque qui leur paraissait typique. (…) Les choses ont beaucoup changé, même plusieurs fois depuis mon enfance et, comme tout le monde à New York, exceptés les intellectuels, j’ai vécu plusieurs vies et continue d’en vivre certaines. »
Jen Fain, une jeune journaliste new yorkaise, entreprend de raconter les petits et les grands événements de sa vie. Au fil de son récit s’égrènent souvenirs, faits divers, portraits de ses contemporains : une vieille dame terrorise les passagers d’un avion, une famille trinque en l’honneur du Dow Jones, et les femmes prennent des amants imaginaires…
Autant d’instantanés photographiques où vient se réfléchir l’Amérique des années 70 en plein contrecoup de l’euphorie des sixties. Ce sont ces émotions de pensée que capture Renata Adler.