Manuscrits de guerre

Manuscrits de guerre
Gracq Julien
Ed. Corti

Ce livre est constitué de deux textes qui s'éclairent mutuellement. Les deux manuscrits figuraient sur deux cahiers différents, parmi le fonds important de textes dont, pour certains, Julien Gracq n'avait pas souhaité qu'ils soient publiés avant longtemps.

Le premier texte est un Journal, qui commence le 10 mai et se termine le 2 juin 1940, écrit à la première personne. C'est un moment crucial de la guerre puisque, après la fameuse « drôle de guerre » et l'inaction qui a commencé à éprouver le moral des Français, l'offensive éclate, brutale.

Le lieutenant Poirier (Julien Gracq) a été affecté sur le front et, avec ses hommes, se retrouvent d'abord le long de la frontière belge puis, soumis à des mouvements et des ordres contradictoires et souvent incohérents.

Ce qui fascine dans ce Journal, tenu à chaud, c'est son aspect inéluctable et prémonitoire. Comment, en un temps aussi court, la défaite militaire a-t-elle été aussi rapide et totale. Comment se sont comportés les soldats français, belges, anglais sur ce mouchoir de poche. Comment est-on passé aussi rapidement à une véritable débâcle, les alliés étant encerclés dans la région de Dunkerque (Les Pays-Bas ayant capitulé le 15 mai, les Belges le 28. Seule une partie du corps expéditionnaire britannique et une petite partie des troupes françaises échapperont à l'étau allemand).

Ce qui étonne enfin, outre cette description palpable d'une défaite annoncée, c'est l'acuité de la perception, tant des choses de la guerre que des rumeurs qui l'entourent, tant des comportements humains que du cadre où elle se déroule.

Le second texte est un récit qui part de la réalité de ces souvenirs pour en faire une fiction, passionnante dans la mesure où l'on voit concrètement comment Julien Gracq passe de la réalité à la fiction (le récit commence le 23 mai) et pourquoi une distance beaucoup plus grande était nécessaire dans le temps, comme dans les circonstances, pour aboutir à la vision plus ample du Balcon en forêt, et non plus comme ici une interrogation sur le basculement des événements et le destin, sensibles dans les trois dernières phrases : « Pour devenir un reître, il lui semblait soudain qu'il ne fallait peut-être pas tant de choses. Non, vraiment pas tant de choses. Seulement trois ou quatre instantanés bien choisis. »

 

Jeunes années. Autobiographie

Jeunes années. Autobiographie
Green Julien
Ed. Plon

«J'ai commencé cette autobiographie dans les plus heureuses dispositions possibles, est-il ridicule de le préciser : avec une sorte d'enthousiasme ? Les mots venaient d'eux-mêmes, conduisant l'auteur vers le paradis de l'enfance, un paradis tout à fait terrestre, non dépourvu de coins d'ombre, mais un paradis malgré tout. L'enfant connaissait le chemin, il n'y avait qu'à le suivre. Malheureusement, au bout du paradis attendait la mort. Elle ouvrit la porte pour laisser sortir l'adolescent et la refermer sur lui, privé de sa mère. Il avait quatorze ans. La vie commençait.»

«À la distance qui me sépare aujourd'hui du jeune homme que je fus, j'essaie non de le juger, mais bien de le comprendre. Il m'apparaît avec l'éternel visage de la jeunesse qui ne sait ce qu'elle veut, ni où elle va, qui ne se connaît pas elle-même et s'engoue tout à coup de ce qu'elle abominera demain, passant de l'enthousiasme au désespoir avec tous les élans que les années se chargeront de briser, crédule, généreuse, injuste - irremplaçable. Ses colères, ses rêves, je les portais en moi. Je ne me sens pas meilleur de ne les avoir plus.» Julien Green

Correspondance

Correspondance
Gustave Flaubert & Georges Sand
Ed. Part commune

C'est lors d'un des célèbres dîners littéraires chez Magny, auxquels participaient les frères Goncourt, Sainte-Beuve, Théophile Gautier, que Gustave Flaubert rencontre George Sand. Une formidable amitié, sans doute unique par la verdeur et la vigueur de leurs nombreux échanges épistolaires, s'établit entre l'auteur de Consuelo et celui de Madame Bovary. Cette correspondance, considérée comme la plus belle et la plus intense de Flaubert, sans doute aussi l'une des plus extraordinaires qui soient, était depuis longtemps introuvable. Cette réédition sous une présentation nouvelle se propose de faire (re)découvrir au lecteur deux monstres de la littérature française, qui avaient l'un pour l'autre une estime et une tendresse sans demi-mesure. Ils s'y parlent de tout, des amis écrivains, de littérature, des affres de la création, des êtres qui leur sont chers, de politique. L'humour mordant y côtoie les confidences les plus émues. On a l'impression à lire ces lettres, de surprendre deux vieux amis discutant à coeur ouvert au coin de l'âtre.

L'atelier de la chair

L'atelier de la chair
Pol Emmanuelle
Ed. Finitude

Mi-horrifiée, mi-troublée, une séduisante jeune femme hésite à s'avouer son attirance pour les hommes âgés. Leurs rides, leurs chairs fatiguées la bouleversent et, surtout, la tentent. Elle décide alors de jeter son dévolu sur un célèbre sculpteur septuagénaire rencontré aux Beaux-Arts.

C'est une passion immédiate, intellectuelle, physique, qui fait vaciller ses certitudes de jeune femme émancipée. Elle se découvre objet sous les doigts du vieil homme autoritaire, consentante, étonnamment soumise.

Emmanuelle Pol, pour son premier roman, explore audacieusement les étapes d'une initiation amoureuse hors norme et le commerce secret qui unit le fantasme à la réalité.

Premier roman


Csillag

Csillag
Royer Clara
Ed. Pierre-Guillaume de Roux

« Les histoires des vraies gens, on ne devrait pas les raconter autant à la légère. »

S'il y a bien une chose dont Ethel ne doute pas, c'est qu'elle est juive. Jusqu'au jour où Côme, son ami chercheur, lui montre en passant la photographie d'une adolescente disparue en 1944. Ethel y reconnaît sa grand-mère, Marie, mais non la croix bien chrétienne qui pend à son cou. Pourquoi sa merveilleuse grand-mère lui aurait-elle menti sur ses origines ? Le désarroi de la jeune femme est d'autant plus fort que Marie, frappée d'Alzheimer, ne peut plus s'expliquer.

Sous le choc, Ethel décide de mener l'enquête à la place de Côme. Une imposture qu'elle regrettera amèrement en découvrant ce que dissimule celle de Marie.

Un récit sous haute tension et magistralement orchestré.

Un garçon singulier

Un garçon singulier
Grimbert Philippe
Ed. Grasset

«Maintenant que j'ai appris à le connaître, je l'aime et il m'effraie tout à la fois. Lui et sa mère vont trop loin, mais tous deux ont eu raison de mes résistances...»

Une simple annonce sur les murs de la faculté a sorti Louis de sa léthargie pour le précipiter sur la plage de son enfance à la rencontre d'une mère et de son fils, deux êtres hors du commun qui vont bouleverser sa vie et l'amener à affronter ce qui dormait au plus profond de lui-même.

Faute d'identité

Faute d'identité
Assayas Michka
Ed. Grasset

« En novembre 2009, j'ai perdu mon passeport. J'ai déposé une demande pour en obtenir un nouveau. On m'a recalé. Dans la France d'aujourd'hui, être un Français né en France de parents français n'est pas une preuve de nationalité. Mes parents ont été naturalisés bien avant ma naissance, je n'ai jamais su au juste ni quand ni comment. Plus de soixante ans après, l'administration française prétend ne pas les connaître. Cela m'a révolté et aussi humilié. J'ai ressenti que c'est à eux que l'on reprochait, à travers moi, d'avoir commis une faute. Je croyais échapper à mes origines, elles m'ont rattrapé. J'ai été élevé en Ile-de-France par une vieille nounou hongroise, dans un monde cosmopolite qui n'existe plus. Si j'ai une identité, c'est celle-là. J'ai écrit ce livre pour célébrer ce continent englouti, dans ses éblouissements comme dans ses failles. »
M. A.

Le début de quelque chose

Le début de quelque chose
Jallon Hugues
Ed. Verticales

C'est une année chaude, c'est le début de l'été.

Regardez, dans l'air tiède, ils essaient maintenant de ralentir, c'est ça, leur respiration semble d'un seul coup plus facile, au bout de quelques heures, ils se sentent déjà beaucoup mieux.

Dans un décor idyllique, ils ont l'air de vacanciers, corps au repos, esprits vidés, état stationnaire.

Un rêve se réalise.

Une nouvelle vie commence.

On les écoute ?

Le début de quelque chose emprunte à l'imaginaire commun des vacances pour mieux y semer le doute, puis le trouble. Avec un sens de la dramatisation implacable, Hugues Jallon transforme notre utopie la plus familière en un cauchemar éveillé.

L'interrogatoire

L'interrogatoire
Chessex Jacques
Ed. Grasset

«- Qui vous autorise à parler en initié de votre propre mort ? Tant que je vous interroge, sachez-le, je ne tolérerai pas que vous en usiez avec la mort comme Guignol se joue des gendarmes !

- Je ne me moque ni de mourir, ni de la mort, ni de ma poussière de mort. Quelque chose en moi, qui parle de retour, me donne irrésistiblement la force de remonter de la poudre où je serai diffus à une espèce de parole, peut-être de voix, un souffle, un glissement d'air où les mots ne sont plus inaudibles mais deviennent précis, à nouveau doués de forme, de son, et capables de s'organiser en phrases. Disons qu'ils sont silencieux, qu'ils se tiennent à hauteur d'oreille entre l'absence et l'écho, et voici, vous les entendez, je vous l'avais dit : 'Je reviendrai.'»

Tout passe

Tout passe
Comment Bernard
Ed. Christian Bourgois

Une vieille dame qui s'apprête à partir avec ses secrets, dans le calme d'une piscine. Un fils qui s'interroge sur un père qu'il n'a pas connu ou presque. Un veuf qui enterre méthodiquement sa richesse. Les conséquences d'une fausse annonce. Un lecteur dans une bibliothèque numérique, par temps de panne électrique. Dans chacun des neuf récits qui composent ce livre, des bribes de passé se dévoilent, et une interrogation se pose, sur le futur et ce qu'il convient de lui transmettre ou non.

Que retient-on d'une vie ? De sa propre vie ? Qu'en restera-t il ? Quelles traces laisser ? Comment infléchir le destin ? Dans un monde qui change, où la continuité est peut-être une illusion qui fait naufrage, les personnages inventés par l'auteur essaient de faire le point (comme on dit aussi d'une caméra). Pas forcément pour y voir clair. Mais pour garder les yeux ouverts, avant la nuit, et dans la nuit.

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