Fragments de Lichtenberg

Fragments de Lichtenberg
Senges Pierre
Ed. Verticales/Phase deux

En à peine plus d'un demi siècle, Georg Christoph Lichtenberg (1742-1799) a eu le temps d'être : un bossu un mathématicien un professeur de physique un amateur de pâté de lièvre un adversaire de la physiognomonie un solitaire un théoricien de la foudre un amateur de jupons un ami du roi George III d'Angleterre un asthmatique un défenseur de la raison un hypocondriaque un moribond et l'auteur de huit mille fragments écrits à l'encre et à la plume d'oie.

On a toujours voulu voir dans ces fragments autant d'aphorismes à siroter comme du schnaps. Certains exégètes prétendent pourtant que ces écrits sont en vérité les morceaux dispersés d'un immense Grand Roman qu'il s'agit de reconstituer, à l'aide de ciseaux, de colle et de papier, et en faisant travailler ce qui nous reste d'imagination. Le présent ouvrage retrace, entre autres choses, le travail mené depuis un siècle par ces vaillants lichtenbergiens, de tous pays et toutes générations.

Le lecteur découvrira aussi dans ce nouvel opus de Pierre Senges comment se fabrique l'allumette soufrée, comment se tort une colonne vertébrale, comment se morcelle un roman-fleuve, comment s'escamote le huitième nain de Blanche-Neige, comment s'inquiète la CIA, comment Polichinelle rencontre Wolfgang von Goethe, comment on incendie les bibliothèques, comment on donne son nom à un cratère de Lune et comment on se livre à diverses comparaisons.

Journal 1966-1974

Journal 1966-1974
Manchette Jean-Patrick
Ed. Gallimard

« Jeudi 29 décembre 1966
Aujourd'hui, ces temps-ci, je ne suis probablement sain tout à fait ni de corps ni d'esprit. Je mesure quelque chose comme 1 mètre 75, je pèse à peu près 60 kilogs. Je suis fatigué, j'ai une crise de foie permanente par manque de sommeil et abus de la bière. Les soucis d'argent, et ceux de Mélissa, que je ressens, me pèsent. Je lis les pléiades de Gobineau, je trouve ça très agréable, je projette de l'adapter pour la télévision. »

En 1966, à l'âge de vingt-quatre ans, Jean-Patrick Manchette commence à écrire son journal. Il le tiendra régulièrement jusqu'à sa disparition en 1995. Ce volume regroupe les quatre premiers cahiers couvrant la période déterminante du 29 décembre 1966 au 27 mars 1974 où Manchette décide de vivre de sa plume et y parvient au prix d'efforts sans cesse renouvelés. À la lecture de ces pages, qui nous installent d'emblée dans le secret de son atelier, ce sont les faces cachées du grand écrivain qui se révèlent peu à peu : le travailleur perpétuel, l'intellectuel subtil, le lecteur dévoré par la passion de la connaissance, même sous ses formes les plus impures. Totalement inédit jusqu'à ce jour, le journal de Jean-Patrick Manchette est un texte exceptionnel, non seulement par son ampleur mais par la férocité de son écriture.

Cette fragilité, en dépit de tout...

Cette fragilité, en dépit de tout...
Runtz Bertrand
Ed. Finitude

C'est une chose bien étrange que les souvenirs. Ils nous appartiennent, font partie de notre vie, de notre mémoire et pourtant, souvent, lorsqu'ils sont racontés avec talent, ils deviennent contagieux. Quand Bertrand Runtz décrit l'excitation d'un enfant découvrant la neige sur la ville à son réveil ou les soirées avec son amoureuse en colonie de vacances, ces souvenirs sont aussi les nôtres.

À travers les huit nouvelles de ce recueil, il saisit avec sensibilité des morceaux d'existence, passés au crible de la mémoire, qu'il s'agisse de la mort d'un ami, de la nostalgie d'un vieux magicien, ou des premiers émois amoureux d'un petit garçon dans la brousse africaine.

La nouvelle chose française

La nouvelle chose française
Nimrod
Ed. Actes Sud

'Comment endosser la posture d'un écrivain qui, a priori, devrait être présenté comme étant dépourvu de lecteurs, de critiques, de journaux, de machines éditoriales et, d'une certaine façon, d'appartenance nationale ?

Telle est la situation de l'écrivain africain de langue française. L'exil est son essence, à l'image de la littérature où il s'inscrit, née sur les quais de la Seine, à l'ombre de la Sorbonne, dans les années 1930.

La Nouvelle Chose française est le manifeste de ce paradoxe. Senghor est celui qui l'a bien compris, qui, sachant que nous n'aurons pas avant quelques siècles le lectorat, l'économie culturelle nécessaire à l'épanouissement de nos écrivains et de notre littérature, invente la francophonie.

Les essais réunis dans ce volume sont pour moi l'occasion d'analyser mon statut d'écrivain exilé pour tenter de comprendre ce dont il retourne quand on écrit loin de chez soi, avec des lecteurs et des critiques étrangers à l'univers de notre création. Traduire des imaginaires et des histoires «d'outre-ciel» dans la langue de Rabelais n'est pas une mince prouesse quand on est sénégalais ou tchadien, mais les frontières du français sont plus vastes que celles de l'hexagone.'

Tels sont les mots de Nimrod, qui propose dans ce livre une profonde réflexion sur l'essence de l'exil, le territoire de l'imagination et les frontières de la langue pour un écrivain.

Le bal des princes

Le bal des princes
Nimrod
Ed. Actes Sud

Après de longues années d'exil, un jeune professeur de littérature est en partance pour le village de son aïeule. Ce matin-là, il traverse le fleuve et rejoint la terre de son enfance, mais au calme habituel s'est, semble-t-il, substitué une étrange agitation : l'un des colonels de l'armée est attendu dans cette campagne tchadienne pour une visite très officielle. Alors que les regards du jeune homme s'évadent vers la beauté des paysages alentour, les villageois l'identifient sans tarder comme la seule personne capable de leur servir d'interprète auprès du colonel. Car les dialectes en ces régions sont multiples et l'isolement de ces provinces du Sud ne pourra s'effacer qu'au prix de l'engagement des populations dans un même combat.

Dans la lumière de midi, le jeune homme devient le médiateur entre le chef de village et cet illustre chef de guerre : une sorte de passeur sommé de rendre intelligibles l'Ancien et le Moderne, d'être le dépositaire des uns et des autres - bien qu'incompris des deux camps -, pour qu'advienne, peut-être, un monde plus homogène.

A travers cette rencontre entre un fils de l'exil et le pouvoir incarné par un militaire, Nimrod explore l'infini du sensible. Dans une langue éminemment poétique, son personnage aborde les rivages de ses contraires : cette condition d'étranger qui fait de lui un amoureux des êtres et des lieux de cet autre versant de sa vie.

Paris, mon pote

Paris, mon pote
Giraud Robert
Ed. Dilettante

Nom : Giraud, prénom : Robert (la maison accepte également Bob, avec le rond de serviette d'un « O » moelleux à souhait), profession : flâneur virtuose, flânocheur émérite, maître-rôdeur, promeneur comme on a l'œil bleu et le menton pointu. Une vie à laisser la trace de ses coudes sur tous les zincs panaméens, à empreindre le bitume de la sculpture de ses chausses. Grand du comptoir comme d'autres d'Espagne. Une rue parisienne où l'on ne croise pas Giraud n'est qu'une voie publique ; les zincs qu'il n'honore pas, de simples débits. Son œil fait tout, sa capacité à humer les ambiances, papiller l'arôme d'un comptoir, nous le livre tout fumant. Dont acte avec ces chroniques : on s'y heurte à Vincent Scotto ou Doisneau (le jumeau stellaire), on y serre les mains fragiles de Fréhel, on y croise des gitans en route pour inhumer en une sépulture secrète un parent conservé dans du sel, on écoute Jojo le Verdurier, on s'égare aux puces de Clignancourt (« cet Angkor de la brocante »), voilà Nénette faite au Mercurochrome, tant d'autres ... « Choses bues » jusqu'à la dernière goutte du terroir parisien dont cet ingénieux des Vins et Trottoir nous parle avec des finesses de braconnier. Laissez-vous prendre.

Contes carnivores

Contes carnivores
Quiriny Bernard
Ed. Seuil

Un botaniste amoureux de sa plante carnivore ;

Un curé argentin qui a la faculté de se dédoubler dans différents corps ;

Onze écrivains morts que vous n'avez jamais lus ;

Une femme-orange qui se laisse littéralement boire par ses amants ;

Une société d'esthètes fascinés par les marées noires ;

Des Indiens d'Amazonie qu'aucun linguiste ne comprend ;

Et l'extraordinaire Pierre Gould qui resurgit sans cesse en héros transformiste...

Quatorze nouvelles fantastiques à l'imagination débridée et au style ciselé, dans la grande tradition des labyrinthes borgésiens et du Passe-Muraille de Marcel Aymé. Le lecteur attentif croisera aussi l'ombre de Thomas de Quincey et d'Enrique Vila-Matas, qui s'invite en personne dans la préface.

PRIX ROSSEL 2008 

 

Oeuvres - Roger Caillois

Oeuvres - Roger Caillois
Caillois Roger
Ed. Gallimard/Quarto

« Mes livres, qui sont très disparates, parlent de la guerre, du rêve, de la poésie, des insectes, de la fête, etc. Je n'ai pas voulu aligner mes préoccupations comme dans un échiquier ; mais en essayant de trouver ce qu'elles avaient de commun, ce que l'on pourrait nommer le tissu conjonctif ou tissu interstitiel, je me suis aperçu que mes livres créaient également des relations obliques entre eux, de sorte que leurs relations étaient plus complexes que ce que j'avais d'abord imaginé. » Roger Caillois, Entretiens, 1970

Ce volume rassemble l'oeuvre de Roger Caillois, écrivain, sociologue et critique littéraire. Il a été établi dans la volonté de conserver toutes les thématiques abordées par l'auteur afin de retenir l'état le plus achevé de sa pensée.

Les Mémoires du Baron Mollet

Les Mémoires du Baron Mollet
Mollet Jean
Ed. Promeneur

'Né en province en 1877, Jean Mollet débarque à Paris sans un sou. Mais, débrouillard et gentil, il séduit tous ceux qu'il approche. Ainsi, après avoir exercé les métiers de directeurs de théâtre, organisateur d'expositions, clerc d'avoué, journaliste, verrier et tant d'autres, connaît-il bientôt le Tout-Paris depuis 1900 jusqu'à nos jours. Mille anecdotes nous sont contées où nous retrouvons pêle-mêle les noms suivants : Apollinaire, Derain, Vlaminck, Braque, Mac Orlan, Marie Laurencin, Picasso, Max Jacob, Jarry, Carco, Cocteau, Blaise Cendrars, Léon-Paul Fargue, etc. Entre la France et la Belgique, il subsiste au jour le jour, réunissant ou ratant mille entreprises avec le même sens de la joie. Mais, grâce à son art de vivre qui sait nier le temps, et par conséquent l'éventualité de vieillir, Jean Mollet parvient à établir un délicieux tableau panoramique de la vie littéraire et artistique du XXe siècle. 'Je suis le chevalier servant de l'art', a-t-il dit. Et c'est comme tel que nous le suivons sur les zigzagantes routes de la liberté et de l'esprit, toujours en accord avec la vie.' (Extrait du prière d'insérer original des Mémoires du Baron Mollet)

Hazard et Fissile

Hazard et Fissile
Queneau Raymond
Ed. Dilettante

Prenez un savant comme Éléazard Hazard, des insectes en latin, un clàoun nommé Calvaire Mitaine, Sulpice Fissile le philatéliste, une pieuvre apprivoisée, les binocles et moustaches du détective Florentin Rentin, Jim Jim le boxeur nègre à l'accent alsacien ; mêlez à cela une belle quantité d'environs de Marseille, un château dit des Broutilles ; saupoudrez avec un inventaire d'objets usuels ; nappez de quelques crimes cocasses, disparitions subites, dialogues en roue libre et proclamations en pente rude de l'auteur qui revendique le droit de changer le nom de personnages « ramassés dans le sable un jour d'ennui et qui n'arrivent que péniblement à [le] distraire » et vous obtenez, en cinquante-neuf feuillets dûment comptés, les vingt-neuf chapitres d'un roman inéditissime de Raymond Queneau : allègre sauterie narrative pour ectoplasmes surréalistes et élémentaires onirocritiques. Souvenez-vous, braves gens, c'était quand Fantômas tenait le piano...

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