Félicien, historien de l'art et analyste, le héros hasardeux de cette fiction, s'évertue à concilier dans l'idylle la psychanalyse et la psychiatrie lourde. Épris de Barbara que tiraillent deux passions adverses, le miroir et la scène, il s'obstine à lui offrir l'amour cru, ce qui revient à « donner ce qu'on n'a pas à qui n'en veut pas ». De Barbara, de Félicien, lequel des amants est-il le plus comédien ?
Voilà le livre. Mort aux mots.
La rupture entre Claire et François conduit ce dernier à plonger dans son passé et à se livrer à de multiples réflexions sur la vie, la société actuelle, l'amour, le temps, la liberté, la solitude de la douleur, etc. Elle l'emmène dans une folle odyssée de deux jours dans Paris, mêlant ses souvenirs au présent.
Dans cette souffrance obsessionnelle où la femme aimée, absente, fait figure de proue, François est progressivement acculé/amené à la folie. Une folie à la fois bénéfique et fructueuse qui lui ouvrira de nouvelles portes tout en lui renvoyant une image plus riche de lui-même et qu'il n'avait pas soupçonnée.
Ainsi l'histoire de ce drame banal prend peu à peu une forme très personnelle où le protagoniste se transforme en un voyageur qui erre entre les questions et les doutes...
« Je suis une ligne simple, je l'ai déjà dit : si je n'invente pas l'histoire, elle n'existe pas. J'applique cependant ce précepte au seul passé, celui qui est dûment avéré et consigné. L'invention du passé est plus intéressante que celle du futur qui n'est que trop prévisible. »
Les dix-neuf nouvelles qui composent ce recueil sont toutes mauvaises. La pire est incontestablement, à l’instar de son titre, Victoire du nazisme : trop longue, larmoyante, nombriliste, décousue et contrefactuelle. Les autres sont heureusement plus courtes.
Un journaliste, mélancolique, désoeuvré, accablé par un deuil, mène l'enquête auprès de ceux qui ont connu Anaïs, jeune fille assassinée. Sur son chemin, il croise des personnages atypiques : Petit Louis, le grand Mao, Toto Beauze, le Légionnaire... Au prétexte d'un meurtre, Lionel-Édouard Martin, auteur d'une vingtaine d'ouvrages, né dans la Vienne en 1956, détourne la notion d'enquête et transgresse toutes les règles du roman policier. Si du genre il conserve la tension caractéristique, c'est pour mieux dire les incertitudes de l'existence et dresser le portrait d'hommes et de femmes aussi singuliers qu'ordinaires.
Des barres d'HLM ponctuent ce large bout de plaine. La géographie locale est comme de la parole qui décroît en force et en signification : les phrases se développent du coeur de la ville, haut juché, bourgeois, vers les berges du Clain ; puis ça remonte, sec et prolétaire, affaibli, vers des coteaux, avant de s'éluder, tout à voix mal audibles, fluettes, vers le pourtour, qui est de plat pierreux. C'est à Poitiers, et ça pourrait bien être ailleurs, avec un autre nom, quelque part en province, un autre cours d'eau, mais la même histoire, les mêmes colline (...)
Tout commence avec l'innocente Marie Granville, servante d'une riche ferme du Cotentin. L'admirable portrait de cette ingénue ouvre un roman gigogne qui se déploie de chapitre en chapitre. C'est ainsi qu'on découvre les Vuillard et les Lamaury, le procureur Darban, l'avocat Laribière et ses réceptions tristes sous l'Occupation.
Au gré des folies de l'adolescence, du jeu sans fin des fiançailles, des petits et grands désastres du mariage bourgeois, on ressort bouleversé par les figures de femmes qui habitent ce roman limpide, construit par bonds et retours fulgurants, comme pour tout saisir de l'appel désespéré du désir, tandis que le bonheur se dérobe comme un rêve d'enfance.
Fresque aux abords feutrés, soudain déchirante, Mai en automne restitue avec une incroyable acuité romanesque l'éclat brut des passions, cette pure énergie qui ébranle les êtres jusque-là suspendus au simple égarement de la vie qui passe.
Un premier roman magistral.
Enfance bruxelloise. L'école où, catatonique d'ennui, je regardais par la fenêtre la pluie tomber. Week-ends à Ostende avec l'ombre d'Ensor toute proche. Ma grand-mère était folle. Hystérique façon Charcot. Mon Tonton, lui, donnait plutôt dans le légèrement psychopathique. Et mon père était prêt à partir n'importe où : Argentine, Amérique... N'importe où, du moment que c'était loin... Foutons le camp, qu'il disait... Tout ce petit monde n'allait pas très bien. Notre médecin de famille était psychiatre, c'est dire... Alors moi, à force, je suis d'abord devenu névrosé, et ensuite, bien plus tard, analyste... Et entre-temps, à l'adolescence fraîche et joyeuse comme la guerre du même nom, j'ai tenté de rejoindre les Tupamaros en Uruguay. J'ai fini sous une tente, dans la montagne, du côté de Briançon...
Enfin, pour faire injure au temps qui passe, et vaincre mes obsessionnelles inhibitions, après mon analyse et grâce à elle, je me suis forcé à écrire. À écrire malgré tout.
Un roman ? Un roman oui, si l'on veut... Mais un roman dont seule la psychanalyse serait alors l'héroïne et la profonde trame.
Dans sa jeunesse, Simon Leys passa deux ans dans une cahute de Hong Kong en compagnie de trois amis, une période bénie où « l'étude et la vie ne formaient plus qu'une seule et même entreprise ». C'est en souvenir de ce gîte régi par l'échange et l'émulation, surnommé « Le Studio de l'inutilité », qu'il a baptisé ce recueil consacré à ses domaines de prédilection : la littérature, la Chine et la mer. Il y éclaire la « belgitude » d'Henri Michaux, dépeint la personnalité de George Orwell, analyse les rouages du génocide cambodgien, épingle les notes de Barthes visitant la Chine maoïste, débrouille les énigmes du « miracle chinois » à la lumière tragique des analyses de Liu Xiaobo, Prix Nobel de la Paix toujours emprisonné. Infligeant de salutaires accrocs à la pensée unique, Leys fait partager ses curiosités et ses admirations, ses enthousiasmes et ses indignations. Ce Studio est une ode au savoir « inutile » et à la quête désintéressée de la vérité.
« On peut très bien vivre dans des zones contaminées : c'est ce que nous assurent les partisans du nucléaire. Pas tout à fait comme avant, certes. Mais quand même. La demi-vie. Une certaine fraction des élites dirigeantes - avec la complicité ou l'indifférence des autres - est en train d'imposer, de manière si évidente qu'elle en devient aveuglante, une entreprise de domestication comme on en a rarement vu depuis l'avènement de l'humanité. »
Christian Beck est né à Verviers (Belgique) en 1879. Homme à facettes multiples, s'affranchissant de toutes contraintes et de tous compromis, il crée l'une des meilleures revues que la Belgique ait connues : Antée. Elle servira de modèle à la NRF.
Fervent défenseur de la langue française, il est l'un des précurseurs de ce qui deviendra la francophonie.
Mystique et agnostique, naïf et cynique, romantique et visionnaire, Christian Beck occupe une place à part dans le milieu littéraire de ce début du XXe siècle. Écrivain vagabond à l'instar de Gorki, il parcourt une bonne partie de l'Europe à pied.
L'action du Papillon, paru en 1910, se situe en grande partie en Italie. Sous les traits de Voldemar, son double littéraire, Christian Beck témoigne d'une époque et de ce qui comptait pour cet homme curieux et attachant : les femmes, les voyages, la table, le vin, le jeu, la philosophie et la littérature.
Il s'est éteint en 1916, à trente-sept ans, emporté par la tuberculose. Apprenant sa mort, André Gide écrit : «C'était un esprit foisonnant qui promettait d'avoir beaucoup à dire, et je ne croyais pas possible qu'il nous quittât avant d'avoir parlé.»
Sa fille, Béatrix Beck, obtiendra le prix Goncourt en 1952 pour Léon Morin prêtre.
Le lecteur trouvera au début de la présente édition une double présentation de l'ouvrage et de son auteur, l'une par Raphaël Sorin, l'autre par Béatrice Szapiro, arrière-petite-fille de Christian Beck.
Un soir à Paris, Daniel Mercier, comptable, dîne en solitaire dans une brasserie, quand un illustre convive s'installe à la table voisine : François Mitterrand. Son repas achevé, le Président oublie son chapeau, que notre Français moyen décide de s'approprier en souvenir. Il ignore que son existence va en être bouleversée. Tel un talisman, ce célèbre feutre noir ne tarde pas à transformer le destin du petit employé au sein de son entreprise. Daniel aurait-il percé le mystère du pouvoir suprême ? Hélas, il perd à son tour le précieux objet qui poursuit sur d'autres têtes son voyage atypique au sein de la société française des années 1980.
Cette fable pleine d'esprit et de malice possède comme le fameux chapeau un charme mystérieux - celui de ressusciter une époque et, surtout, de mettre au jour à travers une galerie de personnages notre rêve commun : voir s'accomplir par magie nos désirs les plus secrets.