Publié en 1926 par un jeune essayiste qui deviendra bientôt un des piliers de la Nouvelle Revue française, Messages a lancé un nom : Ramon Fernandez, et une nouvelle méthode critique, fondée sur l'analyse philosophique des oeuvres littéraires et une conception dynamique de la personnalité. La notion de message s'est imposée dans l'entre-deux-guerres et a servi de référence à Jean-Paul Sartre.
Ce livre, devenu un classique, a ouvert la voie à la « nouvelle critique ». Balzac, Stendhal, Proust et Conrad y côtoient des études fondamentales sur l'art du roman.
En 1943, Proust n'était pas encore mis à la place qu'il occupe aujourd'hui. Dans un temps où l'art moderne était dénoncé par les nazis comme un symptôme de la décadence, il fallait un courage certain pour publier, en pleine occupation allemande de Paris, un livre à la gloire de celui qui était accusé d'en être un des initiateurs. L'originalité de l'étude de Ramon Fernandez, par rapport à toutes celles qui l'ont précédée et toutes celles qui l'ont suivie, c'est que, au lieu de se perdre dans le génial fouillis de Proust, il trace des routes et établit la cartographie intellectuelle et sentimentale de l'auteur d'A la recherche du temps perdu.
Ils sont trois à parler à tour de rôle, trois marginaux en bord de monde.
Il y a d'abord Giacomo, vieux clown blanc, dresseur de caniches rusés et compositeur de symphonies parfumées. Il court, aussi vite qu'il le peut, sur ses jambes usées pour échapper à son grand diable noir, le Sort, fauteur de troubles, de morts et de mélancolie.
Il y a la femme grise sans nom, de celles qu'on ne remarque jamais, remisée dans son appartement vide. Elle parle en lignes et en carrés, et récite des tables de multiplication en comptant les fissures au plafond pour éloigner l'angoisse.
Et puis il y a le môme, l'enfant sauvage qui s'élève seul, sur un coin de terrain vague abandonné aux ordures. Le môme lutte et survit. Il reste debout. Il apprendra les couleurs et la peinture avant les mots, pour dire ce qu'il voit du monde.
Seuls, ces trois-là n'avancent plus. Ils tournent en rond dans leur souffrance, clos à eux-mêmes. Comment vivre ? En poussant les parois de notre cachot, en créant, en peignant, en écrivant, en élargissant chaque jour notre chemin intérieur, en le semant d'odeurs, de formes, de mots. Et, finalement, en acceptant la rencontre nécessaire avec l'autre, celui qui est de ma famille, celui qui, embarqué avec moi sur l'esquif balloté par les vents, est mon frère.
On ne cueille pas les coquelicots, si on veut les garder vivants. On les regarde frémir avec ces vents, dispenser leur rouge de velours, s'ouvrir et se fermer comme des coeurs de soie. Giacomo, la femme grise, le môme, que d'autres ont voulu arracher à eux-mêmes, trouveront chacun dans les deux autres la terre riche, solide et lumineuse, qui leur donnera la force de continuer.
Premier roman
Le retour de Michel Van Loo, détective.
1948. Le détective Michel Van Loo, qui n'a jamais quitté Bruxelles, est brutalement tranplanté au Congo Belge. Cerné par des coloniaux qui se méfient d'un flic venu de Bruxelles, des indigènes travaillés par les premiers mouvements de libération et des espions soviétiques qui lorgnent l'uranium du Katanga, Michel Van Loo se sent seul. C'est sans compter sur le renfort inattendu de trois affreux nains, d'une shampouineuse futée et d'une bande de pieds nickelés congolais, qui vont l'aider à affronter le mystérieux roi du Congo - héros national ou agent communiste ? - dont l'ombre menaçante plane sur le Katanga. Après Périls en ce royaume, on retrouve Michel Van Loo dans un roman qui mêle exotisme et humour ravageur. Et offre une radiographie décapante d'une colonie au bord de l'implosion en pleine guerre froide. Peu de romans ont traité de l'épopée coloniale belge. Celui-ci est un régal.
C'est un cimetière. Où Chloé tente d'écrire un livre de vengeance, un livre qui pourrait tuer. Sa cible, c'est la grand-mère, femme dénuée d'empathie, qui lui a révélé par le biais d'une tierce personne un secret de famille. De ces secrets qui dévastent et ruinent l'identité. Apparaît Théophile, un personnage étrange, grand habitué des lieux. À ses côtés Chloé va visiter les tombes, et entendre les morts un à un se confier. Chacun a son histoire, sa musique, sa chanson. Et sa leçon, peut-être. Qui pourrait être utile à la reconstruction de ce Moi saccagé.
Entrelaçant quête personnelle et voix des disparus, Dans ma maison sous terre est un roman qui interroge notre rapport à la mort, à la littérature et à la psychanalyse.
Sept récits liés par un fil narratif : comme un détail détaché d'une photo, c'est un fait anodin dans l'un qui déclenchera le suivant. Marc Dugain suit sept hommes vivant aujourd'hui, en Dordogne, au Maroc, aux États-Unis ou dans une île lointaine. Les uns sont cyniques, les autres doux et rêveurs, mais tous sont plongés dans les eaux troubles de la vie quotidienne. Ils surnagent, ils s'adaptent, ils essayent de s'en sortir.
Tous perdants ?
Dugain ne nous éclairera pas là-dessus. Il choisit de raconter, tout simplement raconter, et son art de la mise en scène nous surprend à chacune de ces histoires.
J'ai beaucoup lu, depuis très longtemps. Je suis une lectrice assidue, une amoureuse des livres. On pourrait le dire ainsi. Les livres furent mes amants et avec eux j'ai trompé ton grand-père qui n'en n'a jamais rien su pendant toute notre vie commune.
Jade eut l'impression que Mamoune lui assénait cette révélation comme si elle avait fait le trottoir, transformant la lecture en une activité inavouable. F. D.
«En septembre 2007, sans autre intention que de me distraire d'un roman en cours d'écriture, j'ai ouvert un blog, quel vilain mot, j'ai donc ouvert un vilain blog et je lui ai donné un vilain titre, plutôt par dérision envers le genre complaisant de l'autofiction qui excite depuis longtemps ma mauvaise ironie. Rapidement j'ai pris goût, et même un goût extrême, à cet exercice quotidien d'intervention dans le deuxième monde que constitue aujourd'hui Internet et à ces petites écritures absolument libres de toute injonction. Mon identité de diariste est ici fluctuante, trompeuse, protéiforme. Je me considère à mon tour comme un personnage, je bascule entièrement dans mes univers de fiction où se rencontre aussi, non moins chimérique, le réel. Je ne m'y interdis rien, c'est le principe, ni la sincérité ni la mauvaise foi, ni même à l'occasion l'assassinat. Ces pages pourront être lues ainsi comme la chronique nerveuse ou énervée d'une vie dans la tension particulière de chaque jour.» Éric Chevillard
« J'ai compris ce qui se trame mais je veux l'entendre le dire. Je veux qu'il me pince pour me persuader que je ne rêve pas.
- Vous vous en souvenez bien. Vous l'avez lu récemment ?
- Je le connais par coeur, Hugo.
- Par coeur ?
- Je l'ai écrit.
- Ce n'est pas votre nom, sur la couverture.
- Ça s'appelle un pseudonyme. Ou une vaste connerie, si vous préférez.
Il sourit.
C'est un drôle de sourire.
Un sourire qui dessine un reste de souffrance. Une ancienne douleur.
Je me tiens debout, dans l'appartement de Jean Debat. De Pascal Cami. Là où la réalité rejoint la fiction. »
Quelle est la place de la littérature, son emprise sur nos vies, que se passe-t-il si l'écriture nous quitte ? Entre Paris et Londres, des années 1970 à nos jours, la rencontre aussi inattendue qu'attachante d'un jeune étudiant affamé de fiction et d'un écrivain oublié.
« On n'avait pas des masses d'alternatives, Karen et moi, quand on a décidé de voler l'État qui essayait de nous voler nos vies. »
Le long d'une autoroute qui file vers le sud, au son d'un saxophone kamikaze, la cavale hallucinée d'un couple atteint par un étrange neurovirus qui connecte leur cerveau à la station Mir et à son Ange Gardien, le jazzman Albert Ayler. Un voyage au-delà de la réalité et de l'infini, entre états altérés de la conscience et phases de réadaptation.
Un Dantec à tombeau ouvert, dans la veine de Babylon Babies ou de La Sirène rouge.