Bloody Miami

Bloody Miami
Wolfe Tom
Ed. Laffont

Portée par une prose électrique, cette grande fresque en 3D de la vie à Miami est un miroir de l'Amérique des années 2010, comme le fut pour les années 1990 le New York du Bûcher des vanités.
Brillant, culotté, à l'humour corrosif : un Tom Wolfe très grand cru.
« Une invasion armée, c'est une chose, évidemment. Mais Miami est la seule ville d'Amérique – et même du monde, à ma connaissance – ou une population venue d'un pays étranger, dotée d'une langue et d'une culture étrangères, a immigré et établi sa domination en l'espace d'une génération à peine – par la voie des urnes. Je veux parler des Cubains de Miami. Dès que j'ai pris conscience de cette réalité, j'ai trépigné d'impatience : il fallait que j'y aille. C'est ainsi que j'ai passé deux ans et demi dans la mêlée, en plein coeur de l'immense foire d'empoigne qu'est Miami. Il faut le voir pour le croire ; ou bien (oserais-je le suggérer ?) le lire dans Bloody Miami. Dans ce livre – ou il n'est pas question d'hémoglobine, mais de lignées –, Nestor, un policier cubain de vingt-six ans, se retrouve exilé par son propre peuple de la ville d'Hialeah, la véritable « Little Havana » de Miami, pour avoir sauvé de la noyade un misérable émigrant clandestin de La Havane ; Magdalena, sa ravissante petite amie de vingt-quatre ans, leur tourne le dos, à Hialeah et à lui, pour des horizons plus glamour en devenant la maîtresse d'abord d'un psychiatre, star des plateaux télé et spécialiste de l'addiction à la pornographie, puis d'un « oligarque » russe dont le plus grand titre de gloire est d'avoir donné son nom au Musée des beaux-arts de Miami (en lui vendant des faux pour soixante-dix millions de dollars...) ; un professeur haïtien risque la ruine pour que ses enfants mulâtres soient pris pour des Blancs ; un chef de la police noir décide qu'il en a assez de servir d'alibi à la politique raciale du maire cubain ; le rédacteur en chef WASP de l'unique quotidien anglophone encore publié à Miami, certes diplômé de Yale mais qui ne comprend rien aux contradictions intrinsèques et complètement cinglées de cette ville, meurt de peur de perdre sa place – et ses privilèges ; tandis que son jeune reporter vedette, également sorti de Yale – mais qui, lui, a tout compris –, s'échine (avec succès et avec l'aide de Nestor, notre jeune policier cubain) à traquer le scoop qui lui permettra de se faire une place à la hauteur de son ambition... et je n'évoque là que neuf des personnages de Bloody Miami, qui couvre tout le spectre social de cette mégapole multiethnique. J'espère qu'ils vous plairont. C'est un roman, mais je ne peux m'empêcher de me poser cette question : et si nous étions en train d'y contempler l'aurore de l'avenir de l'Amérique ? » Tom Wolfe

Une fille bien

Une fille bien
Jones Holly Goddard
Ed. Albin Michel

Entre Midwest et Sud profond, l'Amérique de Holly Goddard Jones, originaire du Kentucky, est celle des petites villes faussement paisibles dont elle explore le quotidien secret dans ce recueil poignant. La trahison, l'adolescence, l'amour, la mort, les choix parfois cruels... Dans la lignée des grands nouvellistes, Holly Goddard Jones raconte avec une formidable empathie le risque inhérent à toute existence, cet instant imprévisible qui peut mener de la banalité à la tragédie.

« Un livre fort, qui reste longtemps en tête :Holly Goddard Jones possède un talent unique. George Pelecanos

« Un formidable début. Le style naturel de Holly Goddard Jones donne à ses nouvelles une force tranquille et douloureusement humaine. » Booklist

« Ce livre est d'une sagesse à vous briser le coeur » Edward P. Jones

L'affaire Eszter Solymosi

L'affaire Eszter Solymosi
Krudy Gyula
Ed. Albin Michel

Un matin d'avril 1882, à Tiszaeszlár, dans la campagne hongroise, Eszter, une petite bonne de quatorze ans, disparaît en revenant d'une course. Ce jour-là, une réunion se tient à la synagogue du village pour choisir un abatteur rituel parmi les candidats venus de toute la région. Très vite, la rumeur se répand : les juifs auraient enlevé et égorgé la jeune chrétienne pour ajouter son sang au pain azyme de la pâque...

Ainsi commence le roman, inédit en France, d'un des plus grands auteurs de la littérature hongroise, Gyula Krúdy (1878-1933), inspiré de « l'affaire de Tiszaeszlár » qui déclenchera, comme l'affaire Dreyfus en France, une flambée d'antisémitisme dans le pays et aboutira à un procès pour « crime rituel » qui verra comparaître treize accusés.

Se fondant sur les comptes rendus des journalistes et du principal avocat de la défense, Krúdy reconstitue le drame dans toute sa complexité, redonnant vie aux protagonistes avec une puissance d'évocation stupéfiante, brossant le tableau magistral d'une société hantée par la haine de l'étranger. Chef-d'oeuvre romanesque, réquisitoire contre l'intolérance et l'ignorance, L'affaire Eszter Solymosi - qui suscite encore aujourd'hui une vive polémique en Hongrie - témoigne du talent d'un immense écrivain.

La fin d'Alice

La fin d'Alice
Homes A. M.
Ed. Actes Sud

Elle a vingt ans à peine, habite chez ses parents, dans une banlieue cossue, mais elle ne semble pas heureuse, plutôt mélancolique, isolée, et surtout dévorée par un feu intérieur qu’elle dissimule à tous sauf à cet homme à qui elle a décidé d’écrire. Lui a cinquante-quatre ans, il purge depuis plus de deux décennies une peine de prison pour le viol et le meurtre sauvage d’une adolescente de douze ans. La relation épistolaire qu’ils nouent poussera la jeune fille, irrésistiblement attirée par un petit voisin de huit ans son cadet, à passer à l’acte. Tandis que la prédatrice se rapproche de sa proie, le prisonnier, tout en livrant le froid compte-rendu de son quotidien carcéral, dessine les contours de son propre parcours – d’une enfance avilie par une mère déviante à la naissance en lui de ce goût périlleux pour les toutes jeunes filles qui le conduira à la transgression suprême.
Superbement accompli, ce roman dérangeant – et dont certaines scènes pourront parfois heurter – invite à sceller un pacte de lecture inédit en acceptant de créditer de toute l’humanité qui est la sienne un personnage éminemment désigné à l’opprobre, et de se rendre ainsi capable d’en accompagner le cheminement, au sein de l’espace compassionnel créé par la fiction. Pour mieux comprendre, peut-être, un destin parmi d’autres, où, battant en brèche d’illusoires et vertueux désirs de “normalité” s’incarnent soudain, monstrueuses, les profondes ténèbres qui régissent les passions de nos âmes.

Les Fables de Zambri

Les Fables de Zambri
Bierce Ambrose
Ed. Dilettante

Si l'on connaît les Fables fantastiques, souvent rééditées, on ignore qu'elles tirent leur origine d'un autre recueil, Les Fables de Zambri. Publiée en 1874 en Angleterre sous le pseudonyme de Dod Grile, cette parodie d'Ésope, versant parfois dans un non-sens très british, n'avait jamais été traduite en français. Elle témoigne d'un virage dans la carrière d'Ambrose Bierce : pour la première fois, ce dernier délaissait la forme de la chronique satirique pour un registre plus spécifiquement littéraire, celui de la fable. Ce fut le début d'une longue histoire d'amour, car Ambrose Bierce en écrivit plus de huit cent cinquante tout au long de sa carrière !

Nouvelles du New Yorker

Nouvelles du New Yorker
Beattie Ann
Ed. Christian Bourgois

« [Chaque nouvelle de Beattie est] comme un nouveau communiqué du front : nous nous en emparons, impatients de savoir ce qui se passe là-bas, à la lisière du no man's land mouvant et aléatoire qu'on appelle les relations interpersonnelles. » Margaret Atwood


« Personne n'avait jamais écrit comme Ann Beattie. Raymond Carver et d'autres minimalistes étaient des précurseurs, mais son œuvre est unique. Selon John Updike, elle a 'trouvé le moyen d'écrire un tout nouveau type d'histoires'. » The Nation

« Ann Beattie est un trésor national, un auteur de nouvelles qui entrera dans la postérité et continuera à inspirer. » The New York Times

« L'un des maîtres de la nouvelle les plus décisifs et indispensables à notre époque. Beattie saisit et rend brillamment une époque, un lieu et la forme d'un engagement. Sa voix est originale et unique. » The Washington Post

« Ses nouvelles brillamment construites, avisées et obsédantes, sont d'une drôlerie acerbe et composent un magnifique recueil. » Booklist

En numérique chez Tropismes : Nouvelles du New Yorker

Des êtres sans gravité

Des êtres sans gravité
Luiselli Valeria
Ed. Actes Sud

Une jeune femme occupe, à Mexico, une bâtisse délabrée et pleine de recoins avec son mari architecte et deux enfants en bas âge. Entre les blattes de Madagascar, les T-Rex en plastique démantibulés et les chaussettes dépareillées, elle écrit. Des textes courts car elle manque d’air. Et un roman silencieux pour ne pas réveiller les enfants.
Elle écrit sur le fantôme de sa jeunesse, sur l’éditrice insouciante et libre qu’elle était quand elle vivait à New York, portait des minijupes et un manteau rouge, s’enivrait de poésie, fréquentait des hommes excentriques. Écumant les bibliothèques de la ville, elle y avait découvert l’oeuvre d’un obscur poète mexicain habitant à Harlem à la fin des années 1920 : Gilberto Owen. Sous la plume de la narratrice (celle d’aujourd’hui et celle d’alors) se dessinent le poète qu’il a été et la vie qu’elle lui façonne : un artiste fervent qui côtoyait García Lorca, applaudissait Duke Ellington dans les bars enfumés de Manhattan et traduisait Emily Dickinson, enveloppé dans un peignoir de soie – ou un homme radicalement seul, introverti et abandonné de tous...
Ombres du passé, présences insaisissables qui se croisent et s’épient dans un monde en suspension, le métro de New York : ses accélérations vertigineuses, ses replis obscurs, un lieu hors du temps et de l’espace qui attire les êtres sans gravité.
Une suave mélancolie, un humour exquis, une écriture agile et lumineuse pour une interrogation extravagante et grave : combien de vies et combien de morts dans une seule existence ?

Pourquoi je suis devenu écrivain

Pourquoi je suis devenu écrivain
Stasiuk Andrzej
Ed. Actes Sud

Stasiuk, chef de file de la littérature polonaise, nous entraîne à l’époque de sa jeunesse révoltée : ambiance rock’n’roll garantie. Musique, littérature, alcool – la venue à l’écriture de l’auteur se fait en opposition à la déprime d’un quotidien socialiste. Il est entouré de personnages hauts en couleur, eux aussi sur le chemin de la rébellion. L’histoire est en marche, les événements se précipitent : service militaire, désertion, prison, état de siège, clandestinité… Écrite d’un seul souffle, cette confession iconoclaste se moque de tout, et d’abord de Stasiuk lui-même.

En numérique chez Tropismes : Pourquoi je suis devenu écrivain

Le Pèlerinage

Le Pèlerinage
Hashimoto Osamu
Ed. Actes Sud

Dans un quartier résidentiel, un vieillard solitaire s’est attiré la haine du voisinage en entreposant autour de sa maison toutes sortes d’objets de récupération. Odeurs, nuisances, curiosité ou terreur, les dames alentour n’en peuvent plus et face à l’impuissance des autorités, elles alertent la presse.
L’effet attendu est immédiat, les journalistes s’emparent du sujet et cherchent à découvrir l’origine d’une telle dérive dans un quartier huppé. D’un entretien à l’autre, le récit d’une voisine ayant connu cet homme et sa famille dès l’après-guerre éclaire soudain l’inacceptable attitude du vieux Chûichi.
Histoire d’un être perdu dans un monde nouveau, ce singulier reportage va toucher les téléspectateurs et tout particulièrement le frère du vieillard. Ému par une telle déchéance, le cadet de Chûichi revient en effet sur les lieux encombrés de leur enfance, et cela après quarante ans de silence.
Ainsi reprendront-ils le temps de se dire, celui d’écouter. Une sérénité retrouvée pour le vieux solitaire qui propose alors à son frère un voyage, un magnifique pèlerinage depuis toujours espéré tel un point d’orgue, une échappée.
Ce livre met en scène un personnage poétique qui lentement révèle ses traumatismes, ses amours, ses utopies et son bel acharnement à protéger son héritage familial. Un roman qui retrace non sans mélancolie les grands changements du Japon d’après-guerre.

En numérique chez Tropismes : Le Pèlerinage

Jours blancs

Jours blancs
Brouwers Jeroen
Ed. Gallimard

Isolé dans sa maison blanche, un homme compte les arbres, un à un, du bois alentour. Eux sont quantifiables, permettent de se faire une idée de l’étendue de la forêt, et le rassurent face aux jours sans date qui le poursuivent à chacune de ses sorties. Au rythme de ses pas, nous remontons son histoire, en particulier celle de sa paternité non désirée.
Lorsque sa femme Mirjam lui fait part de son envie d’avoir un enfant, il refuse, paniqué. Mis devant le fait accompli, le jeune père assiste sans joie à la naissance de Nathan et à la destruction progressive de son couple. Ce professeur de littérature aura l’occasion de croiser son fils à deux reprises lors de séjours à l’étranger, où il affrontera la colère de cet inconnu. Mais c’est aux Pays-Bas qu’ils se retrouvent finalement lorsque Nathan est hospitalisé dans un état critique.
En distordant le temps de sa langue riche et puissante, Jeroen Brouwers bâtit ici un récit bouleversant sur la paternité. Il parvient à concentrer l’étendue des jours dont la date s'est perdue, donnant corps à une généalogie que seule l’absence semblait définir. Ces innombrables «jours blancs» s’agglomèrent pour faire face en un bloc poétique aux questions de la filiation et de la solitude. Au tabou de la mort entre un père et son fils.

Newsletter